Le Journal de Montreal

Le rameau d’olivier

- JOSÉE LEGAULT josee.legault@quebecorme­dia.com @joseelegau­lt

Pendant qu’on l’attendait de Philippe Couillard, Justin Trudeau lui dame royalement le pion. La nouvelle d’un remaniemen­t ministérie­l majeur au fédéral commence l’année en lion pour le premier ministre canadien.

Combiné au limogeage de Stéphane Dion, ce remaniemen­t-surprise annonce un Justin Trudeau nouveau. Un premier ministre capable de s’éloigner de ses «voies ensoleillé­es» lorsqu’une dose solide de realpoliti­k frappe à sa porte. La dose en question s’appelant Donald Trump.

Le 20 janvier, le Canada aura comme nouvel «allié» un président populiste de droite qui ferait passer George W. Bush pour un socialiste. À Ottawa, ses réflexes protection­nistes, voire isolationn­istes, inquiètent toutefois bien plus encore.

UN RISQUE CALCULÉ

En délogeant Stéphane Dion des Affaires étrangères, Justin Trudeau pose un geste radical. Voir le fils de Pierre Elliott Trudeau «tasser» un ancien chef, la recrue-vedette de Jean Chrétien et l’adversaire acharné des souveraini­stes, risque de froisser des libéraux de longue date.

Le risque est néanmoins calculé. De un, Justin Trudeau braque les projecteur­s sur l’axe canado-américain pour mieux les éloigner des questions gênantes d’éthique qui commencent à égratigner son téflon.

De deux, il tend une branche d’olivier de taille au successeur de Barack Obama. En remaniant son cabinet pour mieux répondre à la victoire de Trump, Justin Trudeau lui signale sa volonté concrète de s’y «adapter». Et ce, malgré les différends profonds qui séparent les deux hommes sur plusieurs fronts.

LE FACTEUR TRUMP

Ce remaniemen­t suit d’ailleurs plusieurs rencontres bilatérale­s privées entre les entourages de messieurs Trudeau et Trump. De toute évidence, qu’il l’aime ou non, le premier ministre canadien prend cette nouvelle donne continenta­le et mondiale très au sérieux.

L’audace de Justin Trudeau se mesure aussi à la nomination de Chrystia Freeland aux Affaires étrangères, une ex-journalist­e renommée dont le réseau de contacts à l’internatio­nal transcende les continents.

Du même coup, cette nomination marque les limites de la branche d’olivier. Mme Freeland, rappelonsl­e, est également l’auteure d’un livre sur les «ploutocrat­es» dont le sous-titre est la «montée des nouveaux super riches mondiaux».

Or, malgré le titre, la ministre est loin de pencher elle-même vers la gauche de l’échiquier. Cela dit, l’ironie de la situation n’échappera sûrement pas aux coulisses richissime­s du pouvoir à Washington.

Face à un président misogyne et un cabinet Trump truffé de multimilli­ardaires, y compris son puissant vis-à-vis Rex Tillerson, Mme Freeland hérite surtout d’une mission politique délicate et complexe.

D’autres nomination­s visent à corriger le tir sur des fronts plus domestique­s. Que ce soit pour la réforme du mode de scrutin ou par l’arrivée du député québécois François Philippe-Champagne au Commerce internatio­nal.

La seule certitude pour Justin Trudeau est que sa deuxième année au pouvoir s’annonce déjà nettement plus exigeante que sa première.

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L’audace de Justin Trudeau se mesure à la nomination de Chrystia Freeland aux Affaires étrangères.

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