Pas un problème... avant
Les francophones ont toujours pu s’exprimer librement dans le vestiaire d’ECJ autrefois
Les joueurs et entraîneurs québécois ou francophones qui ont défilé dans le vestiaire d’Équipe Canada junior depuis bon nombre d’années se sont dits surpris de la controverse unilingue autour de la formation nationale lors du Mondial junior.
Parmi les nombreux anciens membres de l’équipe questionnés par Le Journal de Montréal, il n’avait été demandé à aucun d’entre eux de brimer leur langue maternelle lorsqu’ils sont en groupe.
Cette année, les dirigeants ont demandé aux joueurs de s’exprimer dans la langue de Shakespeare. Par le passé, on n’avait jamais exigé de telles directives.
Entraîneur-chef de la formation canadienne au championnat 2004 en Finlande, Mario Durocher n’a jamais laissé tomber sa langue maternelle dans ses fonctions. Quand il avait à passer son message à Marc-André Fleury ou Maxime Talbot, il s’exprimait en français.
«Hockey Canada est un univers anglophone. Il faut toujours faire attention à la langue par crainte que quelqu’un ne comprenne pas, a-t-il expliqué en entrevue avec Le Journal. Personne ne m’avait demandé de tout faire en anglais. Mais les X et les O sur un tableau, ça peut se comprendre dans les deux langues.»
À sa première expérience au sein de la formation en 2003, Durocher a raconté qu’il avait même mené des exercices d’un entraînement en français! Il avait alors une demidouzaine de francophones devant lui. «J’étais l’adjoint de Marc Habscheid. On avait décidé de faire ça pour unifier le groupe. Jordin Tootoo (un Manitobain) m’avait regardé avec des méchants gros yeux. Il n’avait rien compris. Les gars avaient embarqué dans le concept. Quelques anglophones avaient réussi à se débrouiller.»
Avec ses expériences, l’entraîneur-chef des Foreurs de Val-d’Or est en mesure de conseiller ses protégés quand il quitte vers le camp de sélection de l’équipe nationale.
«La première chose que je leur dis est de se mêler aux autres. C’est su de tous, quand un joueur arrive dans un environnement qu’il ne connaît pas, il colle à ce qu’il peut. Les Québécois sont souvent tous ensemble.»
PHILOSOPHIE CANADIENNE
«La philosophie d’Équipe Canada est de faire une belle chimie d’équipe. Pour ça, tout le monde doit se comprendre. L’anglais est toujours plus dominant, a soutenu Samuel Morin, défenseur de l’édition 2015 sous les ordres de Benoît Groulx, en entrevue téléphonique avec Le Journal, hier. Celui-ci évolue maintenant avec les Phantoms de Lehigh Valley, club-école des Flyers.
«On pouvait parler en français n’importe quand dans le vestiaire. Ce n’était pas interdit, a poursuivi celui qui a vécu cette aventure avec Zachary Fucale, Frédérik Gauthier et Anthony Duclair. Mais par respect pour les anglophones, on parlait en anglais quand ils étaient avec nous. C’est sûr que les dirigeants aimaient mieux quand on parlait anglais.»
Membre de l’édition 2000, Joe Rullier était l’un des cinq Québécois sous les ordres du FrancoOntarien Claude Julien. «Quand je voulais parler à Mike Ribeiro en français, je le faisais. C’était normal dans ce temps-là, a répondu l’ex-défenseur maintenant âgé de 36 ans. Devant d’autres joueurs dans le vestiaire, on faisait attention pour l’esprit d’équipe.»
LA SITUATION DANS LA LHJMQ
Avec la mondialisation du hockey, l’anglais est devenu la langue de communication dans la LHJMQ au tournant des années 2000. Les dépisteurs et les dirigeants de la LNH rencontraient des difficultés à communiquer avec les jeunes espoirs, peu à l’aise en anglais.
«On ne se le cachera pas, c’est la langue du sport, a commenté le commissaire Gilles Courteau. Les communications officielles en équipe se déroulent en anglais pour que tout le monde comprenne.
«On n’a jamais empêché un joueur de parler sa langue maternelle, a-t-il assuré. Que ce soit des Québécois, des Canadiens, des Russes, des Tchèques ou des Américains, ils peuvent s’exprimer dans leur langue.»