Protectionnisme poussiéreux
Dans les cérémonies l’amenant officiellement au pouvoir, Donald Trump a exprimé sa pensée profonde sur le commerce international: les autres pays ont fini de voler nos emplois.
Monsieur Trump n’est plus en campagne. Il n’a plus besoin de répéter ces slogans pour se faire élire. Nous devons comprendre qu’il y croit vraiment et va agir en conséquence.
Nous avions entendu ces arguments lors du débat sur le libre-échange canado-américain il y a près de 30 ans. Finalement, l’expérience du libre-échange a eu raison de ce discours. Aujourd’hui, la vaste majorité reconnaît les bienfaits de ces accords.
Même les organisations syndicales qui jadis propageaient la crainte de voir nos emplois partir ne tiennent plus ce langage aujourd’hui. Elles n’ont jamais annoncé un ralliement officiel, mais elles ne voient plus la pertinence de ce combat.
Nous avons compris deux choses. D’abord, accroître les échanges commerciaux dans le cadre d’un accord correctement négocié crée de la prospérité des deux côtés de la frontière. Deuxièmement, un pays relativement peu populeux comme le Canada n’aurait pas assez de clients pour assurer la croissance de ses entreprises. Ouvrir d’autres marchés, c’est créateur d’emplois.
GENS SOUFFRANTS
Il est facile de comprendre que des Américains désemparés, qui ont perdu leur emploi dans le secteur manufacturier, se soient ralliés au discours de Trump. Lorsqu’on souffre, lorsqu’on se sent abandonné, on est toute oreille pour celui qui s’intéresse à nous et qui pointe du doigt un coupable. Donald Trump a bien lu la réalité et a gagné grâce à leur appui.
Je leur souhaite bien des emplois. Mais il faut reconnaître qu’une part de ce qui leur a été promis relève de l’illusion.
Oui, monsieur Trump peut créer des emplois s’il met de l’avant les politiques appropriées. Mais il est plus qu’illusoire de croire que de fermer les frontières ramènera des usines du Mexique vers le Wisconsin.
Plus illusoire encore, c’est de penser que si jamais on rouvrait de nouvelles usines dans leur ville, ces travailleurs pourraient y entrer miraculeusement. Ces travailleurs ont perdu leur emploi lors de la fermeture d’usines désuètes et dépassées pour la plupart.
Si des usines s’y implantaient cette année, elles seraient équipées des derniers équipements robotisés et entièrement informatisées. Malheureusement, bon nombre des ex-travailleurs d’usine n’auraient pas la formation requise pour y entrer.
Ce qui amène une réflexion plus large sur la relance d’une économie avec des outils comme l’éducation et la formation de la main-d’oeuvre. Des emplois volés par les autres pays? Simpliste et faux.
RÉSISTER
Donald Trump va néanmoins relancer le discours protectionniste. La tentation sera grande au Québec de glisser dans le même genre de discours. Surtout que des échos semblables retentiront d’Europe.
À une époque, les peuples ne commerçaient pas entre eux parce que les moyens de transport des marchandises n’existaient pas. À une époque où je peux télécharger en deux minutes une application ou un logiciel produit en Asie, se battre contre la libéralisation des échanges ne mène nulle part.
Il faut laisser passer le discours de fermeture des frontières comme un orage.