Le gouvernement dépose sa loi spéciale
QUÉBEC | Le gouvernement Couillard a déposé sa loi spéciale hier soir pour forcer le retour au travail des juristes de l’État, alors que des négociations de la dernière chance se déroulaient en coulisses.
Les députés ont été rappelés d’urgence à Québec, malgré la relâche parlementaire, pour débattre du projet de loi 127. Ils devaient siéger toute la nuit et l’adopter en milieu de journée aujourd’hui.
La loi, qui sera adoptée sous le bâillon, mettra un terme à la grève des 1100 avocats et notaires de l’État qui dure depuis 19 semaines.
Elle prévoit également la poursuite des négociations pour une période de 45 jours et la nomination d’un médiateur en cas d’impasse.
Toutefois, si les parties ne s’entendent pas, le gouvernement imposera la convention collective échue en 2015, avec une majoration salariale de 6,75% sur cinq ans.
« ODIEUX »
«C’est odieux, estime Me Jean Denis, président du syndicat des juristes, LANEQ. On nous offre encore beaucoup moins que ce qui a été donné dans l’ensemble de la fonction publique.»
Le président du Conseil du trésor, Pierre Moreau, fait valoir que le gouvernement a fait des concessions depuis le début des négociations, en février 2015.
L’offre salariale pour un juriste de niveau expert est passée de 113 551$ à 116 997 $. Les juristes demandent 119 838 $, selon les calculs du gouvernement.
Toutefois, les pourparlers achoppent sur la principale revendication des juristes, soit la création d’un comité indépendant qui déterminerait leurs prochaines conditions salariales, comme c’est le cas pour les procureurs de la Couronne.
Le gouvernement Couillard refuse, estimant que les procureurs de la Couronne ont un statut particulier en raison de leur indépendance face au pouvoir législatif. «Ce n’est pas un dénigrement du rôle des juristes de l’État», assure Pierre Moreau.
LES NÉGOS SE POURSUIVENT
Au Salon bleu, le chef de la CAQ, François Legault a reproché au premier ministre Couillard de ne pas s’être impliqué pour régler ce conflit qui dure depuis quatre mois.
Philippe Couillard a répliqué en soulignant que son adversaire caquiste l’interpellait pour la première fois sur cette question. «Bien sûr, aujourd’hui, c’est dans les nouvelles, a-til lancé. Quand c’est dans les nouvelles, la CAQ se lève.»
En début de soirée, les négociations se poursuivaient entre Québec et le syndicat. Pour Me Jean Denis, cela équivaut toutefois à négocier avec un «fusil sur la tempe».
Les juristes entendent déjà contester la loi spéciale devant les tribunaux. «On va aller, avec ça, jusqu’à la Cour suprême», dit Me Jean Denis.