Montréal attire moins d’immigrants
Leur nombre a chuté de 20 % depuis 2012-2013, notamment en raison de l’attrait des régions selon des experts
Les débats identitaires depuis la controverse sur les accommodements raisonnables et une réduction des emplois stables disponibles pour les nouveaux arrivants ont tous eu un effet négatif sur l’immigration à Montréal, qui est au plus bas taux depuis plus d’une décennie, croient plusieurs experts.
«On observe un mouvement de malaise un peu plus soutenu par rapport à l’immigration, notamment depuis la soi-disant crise des accommodements raisonnables il y a quelques années, qui a mis le feu aux poudres», observe d’emblée Jonathan Chodjaï, président du guide Immigrant Québec.
Ce «malaise» semble avoir eu des répercussions notables sur l’arrivée de nouveaux immigrants à la métropole. Montréal a accueilli 30 000 nouveaux résidents en provenance de l’extérieur du pays en 2014-2015, le plus bas nombre depuis 2002. Cela représente une chute d’environ 20 % depuis 2012-2013, selon un portrait publié par la Ville récemment.
Selon M. Chodjaï, le débat de la Charte des valeurs du Parti québécois en 2012 ainsi que le protectionnisme identitaire avancé par la CAQ et le PQ cet été ont renforcé ce malaise parmi les nouveaux arrivants.
ATTRAIT DE LA RÉGION
De plus en plus d’immigrants qui arrivent dans la Belle Province évitent la grande ville pour plutôt s’installer en région. Un phénomène lié aux meilleures possibilités d’emplois et aux loyers moins chers, ajoute Annick Germain, professeure spécialiste en immigration à l’INRS.
Selon elle, le gouvernement provincial fait beaucoup d’efforts pour «régionaliser» l’immigration, et les effets se font maintenant ressentir.
«Je ne suis pas inquiète pour l’avenir de Montréal, mais c’est sûr que le coût des loyers qui augmente n’avantage pas la métropole […]. Les immigrants sont maintenant très mobiles et vont chercher de meilleures opportunités d’emploi en région», analyse la professeure, qui n’exclut pas la question identitaire comme facteur également.
MEILLEURE INTÉGRATION
Une croissance de population plus lente n’est tout de même pas une mauvaise chose, car elle permet à l’administration municipale et à la population locale de graduellement intégrer les nouveaux arrivants dans un contexte d’instabilité identitaire, analyse pour sa part Richard Shearmur, professeur au département d’urbanisme de l’Université McGill.
«Des taux de croissance de population modérés sont une très bonne chose. La Ville de Calgary a beaucoup souffert de sa croissance fulgurante depuis les 15 dernières années, notamment à cause de bulles immobilières et d’un rattrapage au niveau des infrastructures. C’est à éviter», indique M. Shearmur.