Crime et châtiment
La scène se déroule au palais de justice.
«Accusé, levez-vous!» Un homme mal rasé d’une quarantaine d’années se lève. «Monsieur, vous avez été reconnu coupable du meurtre au second degré de votre partenaire d’affaires. Non seulement avez-vous commis un crime particulièrement crapuleux, qui a choqué la population, mais vous n’avez jamais manifesté le moindre remords. Je vous condamne donc à passer les 20 prochaines années dans un CHSLD.»
Livide, visiblement sonné, l’homme se met à crier à pleins poumons… «Nooooon! – Qu’on emmène l’accusé!» L’avocat du condamné se lève, furieux. «Monsieur le juge, malgré tout le respect que je vous dois, il est totalement inadmissible que vous envoyiez mon client dans un endroit aussi sinistre. Vous n’êtes pas sans savoir qu’en 1984 le Canada a signé une convention internationale contre la torture.
Même s’ils ont commis des crimes graves, les prisonniers ont droit à la dignité et au respect de leur personne. La Convention des droits de l’homme interdit les traitements inhumains et dégradants, même pour les détenus.
Et en 1988, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies a adopté un ensemble de principes concernant la protection des personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement. Or, les CHSLD violent plusieurs de ces principes!
– Désolé, maître, mais j’ai décidé de donner une peine exemplaire…
– Mais ils n’ont droit qu’à un bain par semaine, monsieur le juge! Ils n’ont pas de télé plasma! Ils n’ont pas de gym, de bibliothèque ou d’écouteurs high-tech branchés à leurs sièges! Quand ils font pipi, on les laisse macérer dans leur pisse pendant des heures! On les attache à leur lit la nuit! Ils n’ont jamais de visites! Et… et… (la voix de l’avocat se brise) ILS MANGENT DU MANGER MOU! À L’ANNÉE! C’est inhumain, c’est cruel!
Je vais porter plainte aux Nations unies, à Human Rights Watch, à Amnistie internationale, je vais écrire à la CroixRouge, je vais organiser des manifestations, des sit-in!
Ces établissements ont été créés pour des vieux et des malades, pas pour des détenus en santé qui ont toute la vie devant eux!
Vous devriez avoir honte, monsieur le juge!»
C’est pas parce qu’on rit que c'est drôle...
UNE BONNE NOUVELLE
Pendant ce temps, à 100 kilomètres de là, dans la petite cuisine d’un petit appartement, un homme d’une cinquantaine d’années parle à sa vieille mère…
«Maman, j’ai une bonne nouvelle! Tu ne devineras jamais ce que j’ai réussi à faire… – Quoi?» L’homme regarde sa mère avec un grand sourire. «Je t’ai trouvé une place à la nouvelle prison de SeptÎles!» La mère pousse un cri de joie. «Pas vrai! Mais, mais… c’est fantastique!» L’homme sort un dépliant de son sac. «Regarde les photos, maman, comme c’est beau! C’est propre, frais peint, il y a de belles couleurs sur les murs!
Tu devrais voir la cafétéria, une splendeur! Et les cellules sont super chouettes! Tu peux même suivre toutes sortes de cours! Es-tu contente?
– C’est la plus belle journée de ma vie! Tu es vraiment le meilleur fils du monde!»