Toronto gagnera encore ?
Depuis que le gouvernement Trudeau en a annoncé la création, nous étions plusieurs à espérer que le siège social de la Banque de l’infrastructure du Canada puisse s’établir à Montréal. L’annonce devrait arriver d’ici quelques semaines. Tous les signaux pointent dans la même direction: Toronto gagnera encore.
Il s’agirait d’une défaite malheureuse pour Montréal et pour le Québec. L’initiative du gouvernement libéral vise à créer une banque d’infrastructure avec une capitalisation de 35 milliards dès le départ. Une partie proviendrait des fonds du gouvernement Trudeau pour les infrastructures. Le reste résulterait d’un effet de levier qui générerait quatre dollars des investisseurs institutionnels pour chaque dollar investi par le fédéral.
L’opération de cette banque créerait selon les estimations entre 200 et 300 emplois à son siège social. Des emplois de haut niveau, pour la plupart très bien rémunérés.
SIGNAL FORT
Pour Montréal et le Québec, une décision favorable représenterait nettement plus que ces emplois directs. C’est tout un secteur d’activité qui pourrait se consolider dans le domaine du financement des infrastructures. Sans parler du signal qu’enverrait le gouvernement en disant que Montréal a encore une place dans le secteur financier en 2017.
Il fut une époque où le secteur financier canadien était bien partagé entre Montréal et Toronto. Au fil des déplacements de sièges sociaux et avec le regroupement de la bourse, Montréal a dû se battre pour garder une place. Le gouvernement du Canada passerait un message positif sur le rôle de Montréal en y établissant le siège de sa Banque de l’infrastructure.
À l’inverse, en favorisant Toronto comme il s’apprête à le faire, le gouvernement Trudeau confirmera la tendance naturelle à tout rapatrier vers Toronto. Pourtant, les justifications de fond ne sont guère convaincantes.
Montréal offre des atouts importants pour une banque spécialisée dans les infrastructures. Dans le secteur de l’évaluation de projets et du montage financier, il existe une expertise exceptionnelle à Montréal notamment autour du secteur du génie.
Depuis les grands projets hydro-électriques jusqu’à aujourd’hui, Montréal a exercé un leadership en la matière. D’ailleurs, l’idée même de cette banque s’inspire du modèle développé par la Caisse de dépôt pour financer le Réseau électrique métropolitain.
Parmi ses atouts, Montréal offre aussi la meilleure possibilité de former une équipe bilingue. Utile si cette banque doit évaluer des projets publics à la grandeur du Canada. On imagine bien qu’à Toronto, les choses se passeront en anglais, point. On paiera un traducteur pour se conformer aux lois.
QUI SE BAT POUR LE QUÉBEC ?
Ce qui me choque, c’est qu’au fond, c’est une bataille politique que le Québec est en train de perdre. Est-ce même une bataille? Qui a livré bataille? Le secteur financier québécois s’est mobilisé pour ce que j’en sais. La Chambre de commerce de Montréal a aussi activement poussé le dossier.
Le ministre Bill Morneau provient de la finance torontoise. Lui ne s’est pas gêné pour faire valoir son point. Où sont nos ministres libéraux du Québec? Nos députés? Justin Trudeau lui-même ne devait-il pas agir comme lieutenant pour le Québec? Décevant.