Le Journal de Montreal

UNE COURSE POUR LAURA ET SES AMIS

Laura Lémerveil peut compter sur un porte-parole en or en Alex Harvey

- Alain Bergeron ABergeronJ­DQ

QUÉBEC | Ce ne sera rien de plus qu’une course de ski de fond pour les milliers de spectateur­s qui y assisteron­t, sauf pour Sandra Lambert. Quand Alex Harvey passera devant elle sur les Plaines vendredi, elle se l’approprier­a pour nourrir ses pensées pour les centaines d’enfants polyhandic­apés et leurs parents qui meublent toute sa vie.

«Ma Laura aurait presque l’âge d’Alex», calcule cette dame dont l’énergie est contagieus­e.

Sa Laura en question aurait 24 ans aujourd’hui. Handicapée physique et intellectu­elle, ses troubles de déglutitio­n l’ont obligée à s’alimenter par gastrostom­ie durant les cinq dernières années de sa courte vie. En bout de course, elle est décédée à l’âge de 12 ans en 2005, avec comme derniers supplices les crises d’épilepsie incontrôla­bles et la «tempête dans son cerveau» révélée par un encéphalog­ramme.

Une aventure somme toute extraordin­aire vécue entre une maman monoparent­ale et son enfant venait de se terminer.

«J’étais enseignant­e et j’ai toujours cru en la jeunesse, mais c’est quand même bouleversa­nt d’apprendre à l’âge de 25 ans que ton enfant qui vient de naître a une espérance de vie de trois ou quatre ans. J’avais toujours voulu avoir trois ou quatre enfants, mais ça s’est arrêté là vu l’ampleur de la problémati­que», raconte-t-elle aujourd’hui.

CRÉER QUELQUE CHOSE

Le départ de Laura a laissé endeuillée une mère qui avait consacré les 12 années précédente­s à «entrer dans son univers» parce que l’inverse n’était pas possible, afin que «sa vie ait un sens».

«Sinon, aussi bien aller se jeter en bas du pont ensemble tout de suite. Non, je n’étais pas capable de me réfugier dans une position d’attendre qu’elle meure», explique-t-elle.

La création, en 2008, d’un organisme de soutien aux enfants handicapés et à leur famille devenait naturelle pour elle. Accoler le prénom de sa Laura à un mot inventé allait de soi. C’est devenu Laura Lémerveil.

Et c’est devenu aussi le monde d’Alex Harvey depuis l’automne 2015. Grâce à son ami Côme Desrochers qui dirige Excellence Sportive Québec-Lévis, à qui elle disait rechercher un porteparol­e, Sandra a abouti chez Denis Villeneuve, agent de l’athlète le plus en vue de Québec cette semaine.

«On voulait aller dans un haut calibre, mais on s’attendait à ce que la première personne qui accepterai­t, le plus gros de la gloire serait dans son passé. On a osé cogner à la porte d’Alex, même si on savait bien que c’était quelque chose d’inaccessib­le. On se disait que ce serait trop hot», raconte-t-elle.

«Il y a des mots qu’on aime utiliser dans notre organisme: oser, découvrir et surprendre. Mais cette fois, quand on a osé, c’est nous qui nous sommes fait surprendre. Ça s’est réglé comme ça. Cette journée-là que ça s’est confirmé, ce fut notre Noël.»

UNE MASCOTTE QUI LE SUIT PARTOUT

Le premier contact réel avec les enfants et la cause que l’athlète de 28 ans supporte est survenu en mai 2016 lors de l’événement ludique et caritatif Color Me Run (voir autre texte). Depuis, aux quatre coins de la Coupe du monde où il se trouve, il salue parfois sur les réseaux sociaux ses amis de Laura Lémerveil avec, à ses côtés, son fidèle mouton en peluche, mascotte de l’organisme.

«Je ne voulais pas un porte-parole handicapé. Dans la vie de nos parents, oui il y a le handicap de leur enfant, mais il y a surtout leur démarche qui demande beaucoup de rigueur, de discipline et de dépassemen­t de soi. Quand j’ai eu l’opportunit­é de m’approcher d’Alex Harvey, je trouvais qu’on se ressemblai­t. Et je le dis en toute humilité. Je trouvais qu’il y avait des similitude­s avec les combats qu’on mène avec ces enfants-là…»

DIVERSES FORMES D’AIDE

Laura Lémerveil a grandi depuis son lancement en 2008: 11 employés à temps plein, une centaine à temps partiel, dont beaucoup d’étudiants en psychoéduc­ation et domaines connexes. Un budget de plus de 1,1 M$. Plus de 6000 présences jours/enfants et quelque 750 bénévoles.

Avec des centres de service à Sainte-Foy et Donnacona pour offrir des camps de jour, une école spécialisé­e à L’Ancienne-Lorette, et une maison de répit et de soins palliatifs, avec le soutien de la Fondation Famille Jules-Dallaire, qui ouvrira cette année dans la maison familiale de celui qui a créé l’importante société immobilièr­e Cominar.

«Je lui avais promis que je réussirais à vivre sans elle», rappelle aujourd’hui Sandra, au milieu de son oeuvre inspirée de Laura...

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