Le Journal de Montreal

Un quart de rein et pas de médecin

Une jeune femme de Québec larguée par son docteur à cause de la « gravité de son cas »

- PIERRE-PAUL BIRON

QUÉBEC | Même après deux cancers et vivant maintenant avec le quart d’un rein, une jeune femme de 22 ans de Québec a été larguée par son médecin de famille en raison de la «gravité de son cas» et elle n’est actuelleme­nt suivie par aucun médecin généralist­e.

Allyson Murphy avait un médecin de famille avant l’apparition en 2015 de sa deuxième tumeur de Wilms, un cancer qui s’attaque aux reins. Son docteur a toutefois préféré rompre les liens après la maladie. «Il n’a pas voulu la reprendre après parce que c’est un cas trop lourd. Il voulait éviter l’erreur médicale, mais son dossier, il le connaissai­t», explique son père Glen Murphy, un peu dépassé par les événements qui s’enchaînent dans la vie de sa fille.

Dès l’âge de cinq ans, Allyson est devenue une habituée des hôpitaux. Le diagnostic de tumeur de Wilms est venu avec six mois de chimio et de radiothéra­pie ainsi qu’avec l’ablation complète d’un rein.

Après 15 ans de rémission, la tumeur «d’enfant» est revenue s’attaquer à l’autre rein de la jeune femme alors au début de la vingtaine. Du jamais-vu pour les médecins. «On pensait tellement que c’était fini, que tout ça était derrière nous», soupire-t-elle.

Si la première tumeur faisait 15 cm, la deuxième en fait 20 et les médecins ne savent plus quoi faire pour sauver Allyson. «Ils ont gratté autant qu’ils le pouvaient afin de préserver une partie du rein pour qu’elle puisse fonctionne­r. Ça a pris 12 heures sur la table d’opération», raconte sa mère, Josée Lechasseur.

NOMBREUSES CONTRAINTE­S

Maintenant en rémission de cet autre difficile combat, Allyson Murphy doit vivre avec plusieurs contrainte­s au quotidien.

En plus d’un régime alimentair­e hyper strict lui interdisan­t le sel, le phosphore et le potassium, sa rate et son rein retirés lui posent problème.

«Je ne peux pas jouer avec ma santé parce que les impacts sont graves. Chaque fois que je fais de la fièvre ou quoi que ce soit, je dois voir un médecin. Mais comme je n’en ai pas, on est vraiment pris entre deux», précise la jeune survivante.

La famille se sent un peu abandonnée depuis qu’Allyson patiente sur la longue liste de gens en attente d’un médecin généralist­e. À défaut d’un docteur qui connaît son dossier et ses nombreux antécédent­s, la jeune femme doit maintenant se tourner vers les cliniques sans rendez-vous, très peu adaptées à son état.

VISITE PRESQUE FATALE

Sa mère se souvient d’une visite dans une de ces cliniques qui aurait très bien pu mal se terminer. Aux prises avec le zona, la jeune femme s’y était fait prescrire un antibiotiq­ue avec de nombreuses contre-indication­s pour la fonction rénale, elle qui n’a plus qu’un quart de rein.

«Il avait lu son dossier en diagonale. On a posé la question juste avant de sortir et une chance, parce qu’elle était faite», se souvient sa mère, craintive depuis cette mésaventur­e. «On se sent vraiment pris au dépourvu.»

Les parents d’Allyson déplorent que la structure actuelle du système ne prévoie pas suffisamme­nt de suivi aux survivants du cancer. Parce qu’une fois le suivi oncologiqu­e terminé, plusieurs se retrouvent devant rien.

«Une fois en rémission complète, tu ne peux pas engorger les spécialist­es comme les oncologues, les néphrologu­es ou autres pour des suivis de routine. Ils sont bien assez occupés. Mais après eux, il n’y a plus rien», s’inquiètent les Murphy.

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Allyson Murphy après l’opération pour sa deuxième tumeur de Wilms.
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PHOTO STEVENS LEBLANC Allyson Murphy à 7 ans après sa première tumeur de Wilms. Allyson Murphy et ses parents, Glen et Josée, se sentent un peu abandonnés depuis que la jeune femme se trouve sur la longue liste d’attente d’un médecin généralist­e. Allyson n’a pas d’autre...
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