Le Journal de Montreal

Les erreurs d’Éric Duhaime

- Richard Martineau richard.martineau@quebecorme­dia.com

Vous avez envie d’écrire un livre et vous voulez qu’il soit bien reçu? Vous voulez devenir la nouvelle coqueluche des médias? L’enfant chéri du showbiz?

Eh bien, ne répétez pas les erreurs commises par Éric Duhaime.

LE PAPE ET SON BEDEAU

Dans son dernier ouvrage, La fin de l’homosexual­ité et le dernier gay, mon ami Éric Duhaime (qui est sorti du placard avec tambours et trompettes) a osé dire qu’il est bien dans sa peau et qu’il ne se considère pas comme une victime. Erreur monumental­e! Au Québec, nous adorons les victimes. Plus tu te grattes le bobo et plus tu fais pitié, plus tu vas t’attirer la sympathie des gens.

Tu veux que ton livre se vende et que le pape et son bedeau t’adressent un concert d’éloges à ton prochain passage à la grand-messe du dimanche?

Eh bien, écris un livre larmoyant, rempli d’anecdotes pathétique­s.

Dis que tu as tiré le diable par la queue toute ton enfance, que tu as fait l’objet de moqueries, que tu broyais du noir et que tu as même songé au suicide, tu verras: la grand-messe ne sera même pas terminée, le pape n’aura même pas eu le temps de bénir ses ouailles et d’excommunie­r les mauvais penseurs que, déjà, ton essai trônera en tête des succès de librairie!

Dany Turcotte sera tellement ému qu’il va te dédicacer son recueil des meilleures blagues homophobes de Piment Fort!

UN CHEMIN DE CROIX

Autre règle d’or de l’édition qu’Éric Duhaime n’a pas respectée: régulièrem­ent, dans ton livre – dans chaque chapitre, si possible – tu dois dire à quel point tu ne serais rien si ce n’était du travail remarquabl­e de la gauche québécoise.

N’oublie pas: nous sommes au Québec. Ici, il n’y a pas de réussite personnell­e.

Si un individu a du succès, s’il tire son épingle du jeu, c’est parce que la société au grand complet (surtout les forces vives de la gauche) était derrière lui!

Ton livre doit ressembler à un chemin de croix.

Régulièrem­ent, tu dois interrompr­e ton récit pour t’agenouille­r pieusement devant les grandes figures de la gauche québécoise qui, par leur vaillance et leur courage, t’ont permis d’être ce que tu es: la sainte trinité FTQ-CSN-CSQ, sainte Françoise, etc.

Non seulement tu dois louanger la gauche le plus souvent possible, mais tu dois profiter de la moindre occasion qui se présente de vilipender et démoniser la droite!

Un livre, vois-tu, ne sert pas qu’à raconter une histoire ou à défendre une thèse: ça sert surtout à te positionne­r sur l’échiquier idéologiqu­e.

Tu ne louanges pas suffisamme­nt le clergé? On te le fera payer.

Tu écris que tu as orienté ta table de travail en direction du Plateau? On te flattera dans le sens du poil et on te consacrera de beaux papiers complaisan­ts dans le cahier Arts et Spectacles.

SYMPATHIE POUR LE DIABLE

Une chose que Duhaime a bien faite: il a demandé à une figure iconique de la gauche québécoise (Marie-France Bazzo) de préfacer son bouquin.

Malheureus­ement, c’est elle qui risque d’être excommunié­e par son Église pour avoir osé prêter sa plume à un suppôt de Satan!

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Comment mettre les critiques dans ta poche...
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