Jeff Reardon est sorti de l’enfer
L’ancien releveur étoile des Expos a surmonté la dépression pour retrouver le bonheur avec sa famille
C’est un Jeff Reardon souriant qui renouera ce week-end avec les amateurs de baseball du Québec, alors que le meilleur releveur de l’histoire des Expos participera à l’hommage rendu à Tim Raines avant le match de vendredi soir entre les Blue Jays de Toronto et les Pirates de Pittsburgh au Stade olympique.
Reardon, qui a connu de grosses saisons à Montréal avec des récoltes de 41 victoires protégées en 1985 et 35 en 1986, est un homme bien dans sa peau aujourd’hui.
Il est l’heureux grand-papa d’une petite-fille âgée de sept mois, Emma, et il apprécie la vie paisible qu’il mène à Palm Beach Gardens, en Floride, auprès de sa douce épouse, Phebe.
On est bien loin de l’époque tourmentée vécue par Reardon dans les années 2000, alors qu’il a sombré dans une profonde dépression à la suite du décès de son fils Shane, le 21 février 2004, des suites d’une overdose.
DU SOMMET DE LA GLOIRE À L’ABÎME
S’il y a un athlète qui est passé du sommet de la gloire (il avait eu l’honneur de protéger la victoire des Twins du Minnesota lors du septième match de la Série mondiale en 1987) au plus creux de l’abîme, c’est bien Jeff Reardon.
Et il n’hésite pas à en parler aujourd’hui, tenant à faire réaliser aux gens qui ont vécu, ou qui vivent une dépression, qu’on peut s’en sortir. Dans son cas, ça lui a pris six ans à s’en remettre.
«À moins d’avoir vécu un tel drame, personne ne peut savoir jusqu’à quel point ça peut être difficile de perdre un enfant, a-t-il expliqué dans une longue entrevue téléphonique accordée au Journal de Montréal. Shane n’avait que 20 ans. Il avait toute la vie devant lui.
«On savait qu’il consommait parfois des drogues au collège, mais ce jour-là, il a commis l’erreur d’avoir surconsommé certaines pilules et il en est mort. Ma femme et moi étions démolis et cela a enclenché une descente aux enfers, dans mon cas.»
PENSÉES SUICIDAIRES, FOLIE ET VOL
Reardon avait perdu le goût de vivre. Il avait des pensées suicidaires (il a failli se jeter devant un camion roulant à toute vitesse sur une autoroute) et il s’est retrouvé dans un hôpital psychiatrique durant trois mois.
«Les médecins m’ont prescrit un tas de pilules et j’en suis venu à perdre complètement la boule, a-t-il confié. J’ai même subi des traitements par électrochocs, comme dans le film Vol au-dessus d’un nid de coucou mettant en vedette Jack Nicholson!
«Toutes ces drogues qu’on m’administrait m’ont rendu cinglé et c’est alors que j’ai commis un vol dans une bijouterie non loin de chez moi, sans savoir pourquoi j’agissais ainsi. Je n’avais même pas besoin d’argent!» a précisé Reardon au sujet de l’incident survenu le 26 décembre 2005.
Rapidement mis sous arrestation par un garde de sécurité au centre commercial, Reardon a dû passer une nuit en prison.
«Heureusement pour moi, j’avais un bon avocat et il a su faire la preuve en cour que je n’étais pas conscient de ce que je faisais en raison d’une surdose dangereuse de médicaments et je fus acquitté pour cause de troubles mentaux.»
LE SOUTIEN DE LA FAMILLE
Reardon a été en mesure de remonter la pente et il est un homme heureux aujourd’hui.
«C’est la preuve qu’il ne faut jamais lâcher prise. La mort de Shane m’a mené vers des moments très sombres, mais heureusement, j’ai toujours pu compter sur le soutien de Phebe et sur celui de nos enfants, Jay et Kristi, pour retrouver la paix intérieure.
«Un tel drame familial aurait pu mener notre couple vers un divorce. On voit cela souvent. Heureusement, ça ne s’est pas produit et nous allons bientôt célébrer notre 40e anniversaire de mariage. L’arrivée de notre petite-fille est venue combler, en partie, la perte de Shane...»
Reardon a hâte de redécouvrir Montréal en fin de semaine, lui qui participera aussi, dimanche, à la deuxième édition de l’Expos Fest.
«Ça va être très agréable de revoir tous ces anciens coéquipiers, de se rappeler les bons souvenirs au Stade olympique. J’ai vécu de si belles années avec les Expos.»