Le Service de police n’est pas au bout de ses peines
Changer la culture au SPVM prendra jusqu’à 10 ans, dit le directeur Philippe Pichet
Départs d’employés frustrés et possibles accusations contre des policiers: le SPVM n’est pas au bout de ses peines, croient des experts. Ils doutent que le plan présenté par le directeur hier soit suffisant pour regagner la confiance du public.
l∫ «Il y a beaucoup d’enquêteurs qui détestent la reddition de comptes. Il faut s’attendre à voir des gens partir et dire que c’est la faute de Pichet, ce qui se passe», souligne Jean-Pierre Gariépy, qui a dirigé le Service de police de Laval de 1997 à 2013 et présidé l’Association des chefs de police du Québec.
Les nouvelles façons de faire risquent selon lui de provoquer des frustrations et il ne serait pas étonnant de voir des policiers claquer la porte.
Hier, le directeur Philippe Pichet a rendu public le plan d’action commandé par le gouvernement du Québec en février à la suite des révélations de notre Bureau d'enquête et de l'émission J.E. sur des allégations de fabrication de preuves au SPVM.
Le gouvernement du Québec avait aussi déclenché à ce moment une enquête administrative sur la police de Montréal.
10 ANS POUR FAIRE LE MÉNAGE
M. Pichet a présenté 38 mesures pour «revirer le paquebot du bon bord». Un changement dont la réalisation, de son propre aveu, pourrait nécessiter jusqu’à 10 ans.
«Une culture, ça peut prendre des années à changer, mais on va prendre toutes les actions pour garder le cap», a-t-il fait valoir.
Les projecteurs demeureront toutefois braqués sur le corps de police, préviennent les experts.
«Il va y avoir encore quelques remous. Des gens vont être pointés du doigt, les enquêtes vont être complétées. Il y a eu un bris de confiance qui ne reviendra pas du jour au lendemain», dit Guy Ryan, ancien policier à Montréal.
L’AIDE EXTERNE EN ATTENTE
M. Pichet avait annoncé qu’un spécialiste en éthique accompagnerait le SPVM pour veiller à l’application du plan.
Il a cependant avoué hier que l’éthicien Yves Boisvert, qui devait occuper ce poste, a finalement été écarté par le SPVM.
«Un article de 2009 de La Presse sur un faux témoignage livré par M. Boisvert est ressorti et on trouve ça dommage, parce qu’il était compétent», a souligné le directeur Pichet.
Pour les experts, il s’agit d’un mauvais départ.
«Le SPVM tente de sauver les apparences. Ils veulent aller trop vite. Ils promettent un plan qui va être supervisé par M. Boisvert pour finalement dire qu’ils n’ont peut-être pas choisi la bonne personne», indique-t-il.
FIN DES ENQUÊTES INTERNES
Jusqu’à nouvel ordre, le SPVM continuera à transférer ses enquêtes internes à la SQ.
Le ministre de la Sécurité publique Martin Coiteux a confié hier qu’il envisage que ce soit le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) qui s’occupe des enquêtes visant les policiers du SPVM.
«On envisage sérieusement de proposer des amendements à un projet de loi pour que les enquêtes qui visent des policiers leur soient confiées», a-t-il déclaré.