Le jour où j’ai dit au revoir à Lola
Ma blonde et moi nous étions posé la question il y a quelques années à propos de notre chatte de cinq ans. «Si Lola est malade, où arrête-t-on le compteur du portefeuille avant l’euthanasie?» Après un moment de réflexion, j’ai répondu timidement «500 $?» Il fallait voir la paire d’yeux en face de moi qui me fusillait. De toute évidence, ma blonde était prête à investir beaucoup plus.
Aujourd’hui, c’est la vraie vie. Tellement que c’est peut-être la vraie mort. Lola est très malade. Ça a commencé par une fatigue et un manque d’appétit qu’on a pris pour une dépression saisonnière. Les 1000 pieds de neige de cet hiver l’écoeurent peut-être, elle aussi. Puis, après deux jours à vomir, on s’est résignés à aller voir la vétérinaire. Une personne charmante, mais dont le charme a un prix qui finit toujours par atteindre autour de 200 $ par visite.
Après 10 secondes d’évaluation, elle détecte déjà une jaunisse sévère. En effet, l’intérieur de ses oreilles est dangereusement jaune. Le foie est assurément atteint, mais il y a peutêtre plus. Il faut investiguer. Prise de sang et compagnie, c’est parti.
Et encore. La vet avait suggéré de l’hospitaliser pour la surveiller. Une de nos filles qui m’accompagnait lui a demandé si ça faisait pareil qu’on surveille nous-mêmes ses signes vitaux. Ça nous a quand même coûté plus de 400 $ pour la consultation, la prise de sang et quatre médicaments pour qu’elle souffre moins, qu’elle mange plus et qu’elle cesse de vomir.
Le deuxième verdict est tombé le lendemain. Le résultat de l’analyse sanguine montre une sévère pancréatite. On ne sait pas si c’est le problème de pancréas qui a créé le problème de foie ou l’inverse, mais une chose est sûre, il faut l’hospitaliser pour trois jours, question de la réhydrater par intraveineuse et tout le bataclan. Un autre 400 $ avec tant de médicaments que j’ai presque le goût d’aller acheter un pilulier à la pharmacie. J’ai l’air à l’argent expliqué comme ça, mais ce qui m’attriste le plus est la mine catastrophée de ma blonde, pour qui Lola est presque sa troisième fille.
Au retour, on constate que l’hospitalisation semble avoir empiré son cas. Son bedon est gonflé comme une poire. La vet nous explique que ça peut être plusieurs choses, dont les conséquences d’un cancer du foie. Pour le savoir, il faudrait passer une échographie, qui coûte autour de 500 $. Payer pour savoir si elle va mourir? Non merci. C’est là que ça s’arrête. On va faire comme si elle allait vivre. Làdessus ma blonde est d’accord.
Tout ça pour dire qu’on l’aime, notre chatte qui ne mange plus par elle-même. Le jour, on se relaie toutes les trois heures pour la gaver de mou avec une grosse seringue. C’est comme ça depuis près de deux semaines. Et une pancréatite, ça peut durer plusieurs mois. Et si c’est le cancer qui la ronge de l’intérieur, on tirera la plogue quand elle souffrira trop. On a jusqu’ici investi 800 $ dans un animal à qui on a fait la promesse de bien s’occuper. Mais on ne va pas payer 10 000 $ pour une échographie, puis peutêtre une chimiothérapie, et quoi encore. Un choix difficile, parce que notre chatte est encore jeune, mais c’est comme le reste dans la vie. À un moment, il faut savoir s’arrêter.
Deux jours plus tard, c’est aussi là que ça s’est arrêté pour Lola. Incontinente, le ventre gonflé par tout ce que son foie n’arrivait plus à filtrer, il n’y avait plus rien à faire. La seule chose qu’on a faite a été de passer acheter des antidouleurs pour que toute la famille profite d’elle un dernier 24 heures. Elle nous manque terriblement.