Le Journal de Montreal

Ils refusent le pot dans les logements

Les propriétai­res craignent les odeurs, les moisissure­s et les incendies avec la légalisati­on du cannabis

- HUGO DUCHAINE

Les propriétai­res de logements redoutent de voir leurs biens moisir, brûler ou empester avec la légalisati­on du cannabis, telle que proposée jeudi par le gouverneme­nt Trudeau.

«J’ai déjà des problèmes avec le pot, des locataires qui fument à l’intérieur ou qui en font pousser, quand ça va être légal, il n’y aura plus rien pour les arrêter», soupire Jean Desforges, propriétai­re d’environ 400 appartemen­ts à Montréal et sur la Rive-Sud.

Jeudi, le gouverneme­nt fédéral a présenté son projet de loi pour légaliser le cannabis en juillet 2018. Il serait notamment légal de cultiver jusqu’à quatre plants de pot par résidence.

Même si les baux locatifs contiennen­t des clauses interdisan­t de fumer, par exemple, il est presque impossible d’empêcher les locataires de le faire ou même de les évincer, selon M. Desforges.

Il a déjà perdu plus d’un locataire à cause de l’odeur «dégueulass­e» de pot provenant d’un voisin.

«Des causes comme ça, ça prend deux ans à la Régie du logement pour avoir une décision, c’est une perte de temps et d’argent», déplore-t-il.

ASSURANCES

Pour sa part, Michel Leduc, dont l’entreprise possède 500logemen­ts à Montréal, se demande si les assurances le couvriront en cas d’incendie provoqué par des lampes, ou si des moisissure­s causées par l’humidité apparaisse­nt dans un logement où un locataire fait pousser des plants de pot.

Il soutient aussi qu’il sera presque impossible de vérifier que la limite de quatre plants est respectée.

Puis, Martin Tessier de l’Associatio­n des propriétai­res du Québec (APQ) craint quant à lui de dangereuse­s modificati­ons aux installati­ons électrique­s pour cultiver le cannabis dans les appartemen­ts.

C’est sans compter, ajoute-til, les risques que pourraient entraîner l’eau ou les chaufferet­tes, par exemple.

CHIMISTES EN HERBE

Pire encore, ajoute Hans Brouillett­e de la Corporatio­n des propriétai­res immobilier­s du Québec (CORPIQ), qui craint une multiplica­tion des «chimistes en herbe» qui voudront extraire la résine des plants de cannabis.

Déjà, de telles tentatives avec de puissants solvants ont causé des explosions dans de nombreux logements de la province.

Selon M. Brouillett­e, le projet de loi du gouverneme­nt Trudeau devrait faire une différence entre un locataire de logement et un propriétai­re de résidence.

Pour l’instant, aucun propriétai­re n’avait eu à interdire de fumer du cannabis dans un bail puisque c’était illégal, dit-il, mais il faudra aussi que la loi puisse le permettre.

«Il ne faut pas prendre les locataires pour des fous», ajoute de son côté Josué Ponce, qui gère un site web mettant en contact des propriétai­res et des locataires.

Selon lui, les propriétai­res font actuelleme­nt «beaucoup de bruit», mais ils risquent d’avoir surtout plus de peur que de mal avec la légalisati­on du cannabis.

« J’ai déJà des problèmes avec le pot [...] quand ça va être légal, il n’y aura plus rien pour les arrêter » – Jean Desforges

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Jean Desforges, qui loue quelque 400 logements à Montréal, voit la légalisati­on du cannabis comme un problème de plus, alors qu’il est déjà difficile de faire respecter les baux et d’évincer les contrevena­nts.
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hans brouillett­e CORPIQ

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