Le Journal de Montreal

France : le plongeon dans l’inconnu

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com

Demain aura lieu le premier tour de l’élection présidenti­elle la plus ahurissant­e, la plus inouïe, la plus inattendue de toute l’histoire de la France moderne.

Le grand nombre d’indécis, le taux de participat­ion et, peut-être, la fusillade survenue jeudi rendent toute prévision hautement aléatoire.

Dans la dernière ligne droite, les sondages semblent indiquer un tassement des appuis pour les deux candidats en tête, Macron et Le Pen.

QUI ?

Ensemble, la candidate de l’extrême droite, Marine Le Pen, et celui de l’extrême gauche, Jean-Luc Mélenchon, dépassent les 40 % des intentions de vote.

Jamais les candidats modérés, qu’ils penchent légèrement à gauche ou à droite, n’ont capté une si faible part du vote. Le centre se ratatine. Aucun des candidats ne cherche à parler à l’ensemble des Français. Chacun sait quel est son segment de marché et s’adresse à lui pour espérer être au deuxième tour.

Pendant la campagne, Emmanuel Macron, qui semble légèrement en tête, a lâché : «Il n’y a pas de culture française. Il y a une culture en France. Elle est diverse».

Dans mon calepin, une telle manière de penser vous disqualifi­e radicaleme­nt. C’est exactement la même bouillie pour chats multicultu­raliste que celle de Justin Trudeau.

Tout le reste du personnage évoque aussi une version gauloise du bellâtre d’Ottawa : vide, vaporeux et moralisate­ur.

Marine Le Pen a travaillé fort pour arrondir les coins du parti fondé par son papa. Mais on n’a pas besoin de gratter très fort pour retrouver les effluves toxiques du vieux Front national.

François Fillon, qui incarne la droite modérée, semblait avoir un boulevard ouvert devant lui jusqu’à ce que les squelettes dans son placard se mettent à danser bruyamment.

Jean-Luc Mélenchon a un programme si extrémiste qu’on se pince : rejet du libre-échange, hausse radicale du salaire minimum, amour déclaré pour Fidel Castro et Hugo Chavez.

Le socialiste «officiel», Benoit Hamon, a remporté l’investitur­e de son parti en disant aux militants exactement ce qu’ils voulaient entendre : à gauche toute, encore plus à gauche.

L’électorat ne veut plus d’une alternance classique. Frustré, il veut donner un coup de pied dans la ruche.

On voit aux États-Unis que le réveil peut être brutal. La gueule de bois peut durer des années.

En France cependant, il est encore plus difficile qu’aux États-Unis de déterminer le moins mauvais choix dans le menu proposé.

CEUX D’EN BAS

Pourtant, il n’est pas vrai que tout va mal en France. Il n’est pas vrai non plus que jadis, tout allait tellement mieux qu’aujourd’hui.

Il est vrai cependant que les années Sarkozy-Hollande peuvent être vues comme 10 années gaspillées.

Quel que soit le gagnant, la France fera un saut dans l’inconnu.

Le problème est que lorsqu’un pays se casse la gueule, ceux d’en bas, ceux dont le vote est le plus motivé par la colère, sont les seuls à en payer vraiment le prix.

Ceux d’en haut ont toujours tout ce qu’il faut pour traverser la tourmente.

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Marine Le Pen Frustré, l’électorat veut donner un coup de pied dans la ruche

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