Le Journal de Montreal

Ils ne veulent plus de subvention­s

Des collectes de fonds et les établissem­ents visités par les artistes financent la fondation

- ANNABELLE BLAIS

Encore profondéme­nt marquée par les critiques qui ont suivi l’annonce d’une subvention pour l’embauche de clowns en CHSLD, la Fondation Jovia ne veut plus rien savoir de l’aide du gouverneme­nt.

Le concept des clowns thérapeuti­ques auprès des personnes âgées gagne pourtant en popularité depuis quelques années.

Mais en 2009, l’annonce de la ministre Marguerite Blais de financer à hauteur de 293 000 $ sur quatre ans le programme Dr Clown pour divertir les aînés en CHSLD avait créé un tollé.

Le gouverneme­nt avait été accusé d’infantilis­er les personnes âgées. L’opposition avait fustigé la ministre, sommée de s’occuper des dossiers plus importants comme la formation d’employés. Pauline Marois, alors chef du Parti québécois, avait qualifié ce financemen­t d’«inacceptab­le».

Des chroniqueu­rs avaient aussi jugé l’idée «méprisante», «aberrante» et «infantilis­ante» à l’époque. «La clientèle des CHSLD n'est pas celle des garderies, peut-on lui épargner les thérapies gnangnan?» demandait-on.

«Même le Parti rhinocéros n’est pas allé aussi loin», critiquait un autre.

« CAUCHEMAR »

L’histoire avait ébranlé plusieurs artistes thérapeuti­ques.

«Ça me révoltait que les gens ne comprennen­t pas ce qu’on faisait, c’était un vrai cauchemar», affirme l’artiste Laura Lacoste alias Joséphine, qui travaillai­t pour l’organisme Dr Clown, aujourd’hui devenu la Fondation Jovia.

Du jour au lendemain, il était mal vu de faire venir les clowns en CHSLD où ils étaient pourtant présents depuis 2002.

«Après, ça a été plus difficile d’aller chercher des clients, reconnaît Martin Goyette, directeur général de la Fondation. Encore aujourd’hui, on subit les contrecoup­s, on doit s’expliquer, dire aux gens d’aller au-delà des caricature­s. Il y a encore des préjugés et des réticences.»

L’organisme a même changé son image de marque en prenant le nom de Fondation Jovia. Dr Clown fait partie de la Fondation, mais est maintenant un programme consacré aux enfants hospitalis­és seulement.

«Mais ce n’est pas facile, car le nom “Fondation Jovia” est encore peu connu alors que Dr Clown a une connotatio­n plus simple pour les clients», ajoute M. Goyette.

Et surtout, la Fondation n’a plus demandé d’aide du gouverneme­nt.

Aujourd’hui, les établissem­ents visités paient environ 50 % du coût, à même leur budget de loisir, et Jovia finance le reste grâce aux activités de collecte de fonds.

DÉFI QUOTIDIEN

«La subvention n’a pas été une bonne chose sur le coup pour nous, alors ce n’est pas dans nos priorités de refaire l’expérience, on ne veut pas revivre ce qu’on a vécu en 2009», explique M. Goyette.

Le directeur reconnaît que ce modèle d’affaires représente un défi au quotidien.

«Dans les prochaines années, on veut devenir plus efficace pour lever des fonds, dit-il. C’est certain que ce n’est pas facile, mais on est stable, on a même augmenté de 30% le nombre de visites l’an dernier.»

 ??  ?? Lors de la visite d’Alfred et Joséphine, Bernard Houle a chanté Ring of Fire de Johnny Cash, une chanson qu’il jouait à la guitare lorsqu’il était adolescent. L’homme de 72 ans souffre de la sclérose latérale amyotrophi­que (SLA) et parvient à chanter...
Lors de la visite d’Alfred et Joséphine, Bernard Houle a chanté Ring of Fire de Johnny Cash, une chanson qu’il jouait à la guitare lorsqu’il était adolescent. L’homme de 72 ans souffre de la sclérose latérale amyotrophi­que (SLA) et parvient à chanter...

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