Le Journal de Montreal

ses deux passions

L’ancien attaquant du Canadien est toujours impliqué dans le monde du golf, à l’âge de 76 ans

- Pierre Durocher PDurocherJ­DM

LOUISEVILL­E | Pour un bon nombre de joueurs du Canadien, le hockey a été toute leur vie. Ils peuvent difficilem­ent s’en détacher. Robert Rousseau, gagnant de quatre coupes Stanley avec le CH dans les années 1960, a toujours eu deux passions, le hockey et le golf.

On l’a retrouvé cette semaine à son club de golf à Louisevill­e, là où régnait une belle fébrilité parmi les employés affairés à la préparatio­n du terrain, à la veille de l’ouverture de la saison.

Ce club appartient à la famille Rousseau depuis 1986 et le paternel en est bien fier. Ce sont ses fils Pierre et Richard qui agissent aujourd’hui à titre de propriétai­res et d’administra­teurs.

Robert «Bobby» Rousseau a joué pour le Tricolore de 1961 à 1970. Ce joueur complet a remporté le trophée Calder en 1962, il a terminé deuxième dans la course pour le trophée Art Ross en 1966 et il a été le meilleur pointeur du CH en 1965-66 ainsi qu’en 1966-67.

UN HOMME AUX MULTIPLES TALENTS

L’homme maintenant âgé de 76 ans a aussi été un golfeur émérite. Il a agi à titre de profession­nel pour les clubs de Joliette, de Bromont, de Saint-Césaire et de Sorel.

«Mon fait d’armes a été une ronde de 66 qui m’avait permis de gagner un tournoi à GrandMère, raconte Rousseau, qui a fait l’acquisitio­n de ce club historique en 2003. J’ai aussi réussi huit ou neuf trous d’un coup.»

C’est un homme aux multiples talents. Il a su remettre dans son état original une maison construite en 1886 dans laquelle on peut aussi admirer sur les murs ses oeuvres comme artiste peintre.

«Mon mari n’a aucun diplôme, mais il est bon dans tout», souligne en souriant son épouse, Huguette.

Au chalet d’accueil du club de golf de Louisevill­e, on trouve plusieurs photos commémoran­t la belle carrière de Rousseau, autant au golf qu’au hockey.

Il avait aidé le Canada à remporter la médaille d’argent au tournoi olympique de Squaw Valley, en 1960. Il y affiche aussi une copie du contrat que le Canadien lui avait accordé à sa saison recrue en 1961-62, pour un salaire de 7000 $!

D’où te vient cet amour pour le golf?

«J’ai grandi dans une famille de 13 enfants, neuf garçons et quatre filles. Nous n’étions pas riches, mais mes frères jouaient au golf à l’occasion au club de Saint-Hyacinthe et j’ai commencé à y travailler dès l’âge de 14 ans. Je nettoyais les bâtons à la boutique du pro. J’ai eu la piqûre du golf très jeune et je joue encore quatre fois par semaine. J’ai bien aimé mes années passées comme profession­nel dans divers clubs de la province. Autant j’ai apprécié la pratique d’un sport collectif comme le hockey pour gagner ma vie, autant j’ai aimé un sport individuel comme le golf. Je suis devenu propriétai­re de deux clubs à la suite d’un concours de circonstan­ces. C’était de belles occasions d’affaires et, aujourd’hui, ce sont mes garçons qui ont pris la relève.»

Est-ce difficile de rentabilis­er les opérations d’un club de golf de nos jours, alors qu’on enregistre une baisse d’achalandag­e partout au Québec?

«C’est vrai que le nombre d’adeptes a diminué depuis 10 ans. Il faut trouver des façons d’attirer l’attention des plus jeunes. Ici, à Louisevill­e, nous sommes très proches de notre clientèle. Il y a un aspect familial. Pas moins de 27 membres ont participé bénévoleme­nt aux opérations printanièr­es sur le terrain. On ne voit pas cela partout.»

Suis-tu de près les séries éliminatoi­res dans la LNH?

«Bien sûr que je regarde les matchs du Canadien avec beaucoup d’attention. Mon joueur favori est Alexander Radulov. J’avais d’ailleurs prédit à mon épouse qu’il allait marquer en prolongati­on lors du second match de la série. Le but qu’il a inscrit d’une seule main dimanche soir à New York m’a fait bondir de mon fauteuil. J’aime ce genre de joueur. J’ai toujours eu le Canadien dans le sang. Mes frères Roland et Guy ont eux aussi disputé des matchs avec le CH. Guy avait même obtenu une mention d’assistance sur le 400e but de Maurice Richard. Nous étions cinq garçons dans la famille à avoir joué au hockey.»

Tu as réalisé des exploits dans l’uniforme du Canadien, dont une performanc­e de cinq buts le 1er février 1964 contre les Red Wings. Quels souvenirs gardestu de cette soirée?

«Tout avait bien fonctionné pour moi. Je ne pensais jamais réussir un tel exploit, surtout contre un gardien du calibre de Roger Crozier. Je me souviens que je n’avais pu télé-

phoner à mon épouse après le match, devant répondre longuement aux questions des journalist­es. Elle avait été forcée de rater la rencontre au Forum, étant enceinte de neuf mois.»

Et que peux-tu nous dire de ton but marqué sur un tir de pénalité, le 15 février 1962, alors que tu avais battu Bruce Gamble, le gardien des Bruins, avec un lancer frappé provenant de loin?

«J’avais figé en arrivant à la ligne bleue et j’avais réagi instinctiv­ement, m’élançant à la manière d’un golfeur. Je me souviens qu’il y avait eu un moment de silence au Forum, et la foule avait ensuite explosé de joie en voyant la lumière rouge s’allumer. J’étais gêné en patinant le long de la bande. À mon retour au banc, Dickie Moore m’avait lancé: «Tu as été chanceux, kid.» Il est vrai que j’aurais mal paru si j’avais raté mon tir.»

Quel est ton plus beau souvenir dans l’uniforme du Canadien?

«Ce fut sans aucun doute la première des quatre conquêtes de la coupe Stanley, en 1965. J’avais enregistré 13 points en 13 matchs et j’avais eu l’honneur de prendre place dans une voiture décapotabl­e aux côtés de Jean Béliveau lors du défilé au centre-ville. C’était magique. J’ai eu beaucoup de plaisir à former une ligne d’attaque avec Jean et Gilles Tremblay, qui ne sont malheureus­ement plus de ce monde. Toe Blake aimait bien m’employer à la pointe lors des situations de supériorit­é numérique. Je n’ai jamais oublié nos longs voyages en train jusqu’à Chicago. On arrivait souvent tout juste à l’heure, et les policiers devaient escorter l’autobus jusqu’au Chicago Stadium. On ne servait pas de repas dans le train. Il fallait donc acheter des sandwiches au dépanneur non loin de la gare à Montréal. Les temps ont bien changé...»

Quelle a été ta plus grande déception en tant qu’équipe?

«Il est dommage qu’on n’ait pas réussi à remporter la coupe Stanley face aux Maple Leafs en 1967, car cela nous aurait procuré une séquence de cinq conquêtes, ce qui aurait égalé la marque appartenan­t à l’équipe des années 1950. Les Maple Leafs misaient sur plusieurs joueurs d’expérience. Terry Sawchuk et Johnny Bower avaient brillé devant le filet.»

Aimes-tu le genre de hockey qu’on voit aujourd’hui?

«C’est si différent. Dans notre temps, c’est le joueur qui contrôlait la rondelle. On ne la tirait pas à l’autre bout de la patinoire. Le jeu est si rapide et physique aujourd’hui. On a raison de s’alarmer au sujet des commotions cérébrales que les joueurs subissent. J’en ai eu deux dans ma carrière et ce fut pénible.»

Qu’as-tu fait de tes bagues de la coupe Stanley et de la médaille olympique?

«J’ai donné la médaille d’argent à mon petit-fils de 14 ans, William, qui joue au hockey dans un programme de sport-études à Trois-Rivières. J’ai bien aimé participer aux Jeux olympiques. J’étais l’un des trois joueurs d’âge junior qui avaient été invités à rallier les rangs de la formation sénior qui représenta­it alors le Canada. Pour ce qui est de mes souvenirs reliés aux conquêtes de la coupe Stanley, ils sont allés à mes enfants.»

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1. Robert Rousseau pose fièrement devant la statue le montrant en train de s’exécuter sur les verts, statue sculptée par Jean Chevalier, le père de Martin, directeur photo au Journal. Elle se trouve à l’entrée du club de Louisevill­e. 2 et 3. Rousseau a...

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