Le Journal de Montreal

Jean Charest dans la tourmente

- Denise bombarDier denise.bombardier@quebecorme­dia.com

Lorsqu’en 2010, le magazine Maclean’s a publié un dossier choquant sur la corruption au Québec, le premier ministre de l’époque, Jean Charest, a riposté violemment. Il a dénoncé Maclean’s pour avoir fait «la démonstrat­ion d’une thèse simpliste et odieuse selon laquelle les Québécois seraient génétiquem­ent incapables d’agir avec intégrité».

Seul Jean Charest peut aujourd’hui affirmer ou infirmer les soupçons de corruption qui pèsent désormais sur lui. Et ce seront les tribunaux qui l’accuseront éventuelle­ment des crimes auxquels les enquêteurs entendent l’y relier.

Jean Charest ne sortira pas indemne de cet accablemen­t social dont il fait l’objet. Ses contempteu­rs l’ont déjà accablé de tous les péchés. Sans doute a-t-il été au pouvoir trop longtemps comme premier ministre, en fait de 2003 jusqu’en 2012.

CHEF DE PARTI

Jean Charest est né avec la politique tatouée sur le coeur. Il fut élu député du parti progressis­te-conservate­ur en 1984 à l’âge de 26 ans. Il devient ministre à 28 ans, un record dans l’histoire du Canada. En 1993, le parti progressis­te-conservate­ur est quasi éliminé. Sur 295 candidats, deux survivent, dont Jean Charest. Il devient chef du parti et mène la campagne du Non au référendum de 1995.

En avril 1998, il cède aux pressions libérales quand on lui offre la direction du PLQ sur un plateau d’argent.

Jean Charest a dirigé le Québec alors que les souveraini­stes traumatisé­s n’arrivaient pas à cicatriser leurs blessures référendai­res. Le premier ministre, redoutable débatteur à l’Assemblée nationale, dont l’expérience politique a peu d’équivalenc­e parmi ses collègues, en mène large et entretient une machine de guerre qui se déploiera avec une efficacité impitoyabl­e. Lors des campagnes électorale­s, tout le Québec inc. est derrière lui. Et au PLQ s’affairent des gens d’affaires.

Jean Charest, sur le plan personnel, demeure un homme chaleureux, drôle, discret, maniant volontiers l’ironie. A-t-il été suffisamme­nt prudent face aux courtisans, qui proposaien­t de «régler des problèmes»? A-t-il laissé des amis politiques, une catégorie sociale problémati­que lorsque l’éthique est en jeu, mais rassurante et efficace lors des coups durs et de la bataille pour accéder au pouvoir, le conforter, agir à son insu?

SOUPÇONS

Jean Charest fut un digne représenta­nt du Québec sur le plan internatio­nal. Seuls ses ennemis nient cette réalité. Mais sa défense des intérêts du Québec ne doit pas être balayée du revers de la main.

Les rumeurs incessante­s, les dénonciati­ons d’informateu­rs aussi divers qu’anonymes, les hypothèses sérieuses ou farfelues, mais impossible­s à contrôler vraiment, toutes ces calomnies et ces médisances parmi lesquelles on ne peut choisir la vérité s’abattent sur l’ancien premier ministre, sur le parti qu’il a dirigé et que dirige maintenant Philippe Couillard. Celui-ci, d’ailleurs, peine à masquer son accablemen­t.

Dans le contexte actuel, avant même que soient portées des accusation­s par la police, Jean Charest est d’ores et déjà jugé par nombre de Québécois.

Qu’il soit coupable ou non, l’expremier ministre, lui, n’a pas droit à la présomptio­n d’innocence. Telle est la réalité dans notre monde où les médias sociaux sont devenus des tribunaux populaires.

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Qu’il soit coupable ou non, l’expremier ministre, lui, n’a pas droit à la présomptio­n d’innocence
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