Le Journal de Montreal

La culpabilit­é le ronge toujours

Un père dont le fils s’est suicidé à l’âge de 12 ans veut maintenant faire de la prévention dans les écoles

- Nicolas Saillant NSaillantJ­DQ

QUÉBEC | Quatre ans après le suicide de son fils de 12 ans seulement, un père de famille «survit» à travers la culpabilit­é et l’incompréhe­nsion qui le rongent toujours, mais sa planche de salut réside peut-être maintenant dans la prévention qu’il souhaite faire.

«Tu te dis sans cesse “Pourquoi je n’ai pas vu venir ça ?” En tant que père, pourquoi je n’ai pas vu que mon petit gars avait de la peine?» lance Carl Laplante, incapable de lâcher prise.

Quatre ans après le suicide de son fils Jakoby, ces questions résonnent encore «tous les jours» dans sa tête malgré ses tentatives pour s’en libérer.

SANS AVERTISSEM­ENT

En novembre 2012, Carl Laplante reçoit un appel du directeur de l’école de son fils à Drummondvi­lle parce que ce dernier a été pris avec des amis à jouer avec un briquet et du papier dans une toilette. Dans le bureau du directeur, M.Laplante sermonne Jakoby avant de convenir avec le supérieur qu’une suspension d’un avant-midi est appropriée.

Sur le chemin du retour, Jakoby et son père ne s’échangent aucun mot. Le jeune garçon s’installe ensuite dans sa chambre afin de faire un devoir punitif. Pendant ce temps, Carl Laplante sort faire une commission pendant 30minutes. À son retour, il découvre son fils inerte dans sa chambre.

En présence de deux de ses trois autres enfants pour «la pire journée de sa vie», Carl découvre un seul mot: «Pardonnezm­oi maman et papa, je vous aime».

«Il y avait zéro signe avant-coureur. Au contraire. À l’école, ça allait bien, il n’a pas eu d’intimidati­on», comprend encore mal Carl. «J’ai essayé de trouver pour comprendre, les policiers aussi, avec l’enquête, mais il n’y a rien, on n’a rien trouvé».

UN SEUL INDICE

Mature pour son âge et plutôt solitaire, Jakoby a laissé un seul indice en se confiant à sa gardienne plusieurs mois avant le décès. «Il se culpabilis­ait pour tout. Je ne sais pas d’où ça vient, mais il se sentait toujours coupable de tout», raconte son père.

Cette découverte a été un dur coup pour Carl, lui qui avait chicané son fils devant le directeur le jour de son suicide. «C’est sûr que dans ma tête j’ai la culpabilit­é d’avoir été la goutte qui a fait déborder son vase.»

Après plusieurs thérapies et quatre ans de deuil, Carl Laplante se dit maintenant prêt à parcourir les écoles pour faire de la prévention auprès des jeunes. «On dirait qu’il faut attendre que ça arrive avant d’en parler. Je veux convaincre les jeunes de dénoncer un ami s’il parle de suicide. Ce n’est pas un secret qu’il faut garder», plaide le père, encore tiraillé entre le désir de parler et la douleur qui le retient toujours.

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