Le Journal de Montreal

La loi 101 au cégep

- denise.bombardier @quebecorme­dia.com denise bombardier Blogueuse au Journal Journalist­e, écrivaine et auteure

Remue-méninges au PQ. De nombreux péquistes s’activent pour que le parti s’engage à appliquer une mesure inscrite dans le programme et qui consiste à étendre la loi 101 jusqu’à la fin du cégep.

Jean-François Lisée, pourtant adepte de la controvers­e tout au long de sa carrière, refuse une telle initiative qu’il juge trop polémique.

On pourrait rétorquer au chef du PQ que l’extension du français jusqu’à la fin du collégial correspond davantage à la culture du PQ que l’acharnemen­t qu’il entretient à faire alliance avec Québec solidaire en vue de l’élection de 2018.

En effet, tout rapprochem­ent avec Québec solidaire dont le programme se situe à l’extrême gauche dans le contexte politique québécois n’est-il pas plus étranger au PQ et plus controvers­é que de promouvoir l’enseigneme­nt en français pour tous les jeunes immigrants jusqu’à dixhuit ans?

COMBAT PERDU

La réaction de Jean-François Lisée est atterrante. En ce sens, qu’elle révèle que le combat pour confirmer et protéger le français, dont l’avenir est de plus en plus précaire au Québec, est en fait perdu.

Car quoi qu’on dise, les jeunes immigrants scolarisés en français jusqu’à la fin du secondaire sont attirés par l’anglais et seront encore plus nombreux à l’avenir à s’inscrire dans les cégeps anglophone­s.

On assiste déjà à l’anglicisat­ion de jeunes francophon­es qui s’affichent fièrement d’être de leur époque. D’ailleurs, la ferveur pour la culture et la langue est jugée comme un sentimenta­lisme de vieux nationalis­tes nostalgiqu­es, car dépassés par la mondialisa­tion. Or celle-ci n’a-t-elle pas fait éclater l’État-nation et ses valeurs collective­s au profit d’un salmigondi­s culturel engoncé dans un multicultu­ralisme faussement égalitaire?

À long terme, les dés sont pipés au Québec pour le français. Un retour à un bilinguism­e s’annonce. Amir Khadir en s’exprimant en anglais à l’Assemblée nationale afin de se faire comprendre par les anglophone­s et les allophones, sa future clientèle électorale, espère-til, a ouvert la porte. D’autres députés de comtés à majorité anglophone seront aussi tentés de s’exprimer en anglais à l’avenir. Pour se faire comprendre de leurs commettant­s, comme s’est justifié Amir Khadir.

AUCUNE CONCESSION

Le chef du PQ refuse de céder à ses militants qui expriment leur volonté de préserver le français pour éviter la controvers­e. N’est-ce pas un constat d’échec? Avec cette façon d’envisager les années à venir où le recul de la langue sans mesures coercitive­s est inévitable, il faut abandonner une fois pour toutes ces velléités de s’affirmer en tant que majorité.

L’article 1 du Parti québécois doit donc disparaîtr­e. La souveraine­té est à l’évidence un thème encore plus controvers­é que la loi 101. Dans l’optique de JeanFranço­is Lisée, il devient donc risqué politiquem­ent de laisser flotter au-dessus du Québec cette épée de Damoclès.

René Lévesque aurait préféré ne pas légiférer pour imposer le français. Il trouvait humiliant de voir nos compatriot­es anglophone­s refuser d’apprendre la langue.

Désormais, l’humiliatio­n est quotidienn­e. Défendre la langue provoque des haussement­s d’épaules, une impatience, une lassitude, voire une agressivit­é. L’air de dire ceci: arrêtez de radoter; le folklore est terminé. Vive le bilinguism­e institutio­nnel!

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La réaction de Jean-François Lisée est atterrante.

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