Qui sont les « idoles des jeunes » ?
J'aimerais poser une question aux parents qui s'inquiètent du phénomène 13 Reasons Why: avant que les médias en parlent, combien d'entre vous avaient entendu parler de cette série de Netflix qui raconte l'histoire d'une jeune fille qui se suicide? Saviez-vous si vos enfants étaient des fans de la série?
Plus largement: combien de parents, actuellement, savent quels sont les livres, les films, les jeux qui font triper leurs enfants?
BEST-SELLER MONDIAL
Cette semaine dans le Globe and Mail, le chroniqueur John Doyle posait une excellente question: «Combien de parents se sont donné la peine de lire 13 Reasons Why quand ce n'était qu'un roman? Écrit par Jay Asher, il a été publié il y a 10 ans, a été le best-seller #1 aux États-Unis auprès des jeunes adultes, fut traduit et publié dans 34 pays».
Doyle met le doigt en plein sur le bobo. Comment un livre peut-il se vendre à des millions d'exemplaires auprès des jeunes, mais passer complètement inaperçu sur le radar des adultes?
Comment les parents peuvent-ils être aussi déconnectés des intérêts de leur progéniture?
Ça m'a fait penser à l'affaire Maxime Roussy, cet auteur jeunesse qui a été condamné, en mars, à cinq ans de prison pour agressions sexuelles sur une jeune lectrice.
Quand l'histoire est sortie en 2011, je me rappelle de la réaction de la plupart des adultes: Maxime qui?
Pourtant, Roussy vendait des centaines de milliers d'exemplaires de ses livres Pakkal et Le Blogue de Namasté. Adoré des jeunes, inconnu des grands.
CHACUN DANS SA BULLE
On vit dans un monde dans lequel chacun des membres d'une famille est rivé à son écran (et je ne vous fais pas la morale, c'est pareil chez nous). Papa sur son ordi, maman sur son iPad, et les ados sur leur cell. Mais à force de se créer chacun notre petite bulle, on en finit par s'isoler les uns des autres et par ne plus savoir ce qui fait vibrer le coeur des gens qu'on aime.
Alors qu'avant, on s'asseyait tous ensemble pour regarder la même émission ou on partait ensemble pour voir le même film, on vit nos vies en parallèle, sans que nos chemins culturels se croisent. Papa suit District 31, maman écoute La Voix en reprise sur Illico et les deux ados... ils écoutent quoi, les deux ados?
Si on leur demandait ce qui les allume, ce qui les accroche? Derrière la porte de leur chambre, de l'autre côté de leurs écrans, ils ont toute une vie culturelle qui nous échappe.
Au moins, quand on était jeunes, nos parents nous disaient qu'ils haïssaient notre musique... mais au moins, ils pouvaient l'entendre!
Avec des écouteurs bien plantés dans les oreilles, les ados d'aujourd'hui ne peuvent même pas nous décourager avec leurs choix musicaux: on ne les entend pas!
DIS-MOI CE QUI T'ALLUME
Les jeunes tripent sur des youtubeurs qui deviennent millionnaires avant 20 ans. Mais combien de parents seraient capables de nommer les idoles de leurs enfants?
C'est ce que John Doyle appelle très justement le «narcissisme adulte» face à la culture populaire des jeunes: si tu ne l'as pas en pleine face, ça n'existe pas.
Il serait peut-être temps qu'on s'ouvre les yeux.