Le Journal de Montreal

JACQUELINE GAREAU AIME PARTAGER SES SECRETS

À 64 ans, l’ancienne championne du marathon de Boston demeure une passionnée de la course à pied, elle qui travaille comme massothéra­peute

- Pierre Durocher PDurocherJ­DM

SAINTE-ADÈLE | Jacqueline Gareau a marqué l’histoire de la course à pied au Québec. Elle est toujours la seule Canadienne de l’histoire à avoir gagné le prestigieu­x marathon de Boston, en 1980.

Triompher dans cette épreuve est en quelque sorte l’équivalent de remporter le tournoi de tennis de Wimbledon ou le Tournoi des Maîtres au golf. Ça marque une vie.

«À l’époque, on m’avait simplement remis une médaille et une couronne de laurier. Il n’y avait pas encore de bourse accordée aux vainqueurs», raconte en souriant Gareau lorsque Le Journal l’a rencontrée à son domicile de Sainte-Adèle, où elle gagne sa vie comme massothéra­peute.

Un documentai­re sur la riche histoire du marathon de Boston sera à l’affiche le 15 mai dans les salles Cinéplex. On pourra y entendre les commentair­es de Gareau au sujet de sa victoire remportée dans la controvers­e il y a 37 ans.

Rappelons que c’est une dénommée Rosie Ruiz qui avait été la première femme à croiser la ligne d’arrivée. On avait ensuite établi la preuve qu’elle avait triché en ne courant pas la distance au complet, ne se joignant à la course qu’à quelques kilomètres de la fin.

Une semaine plus tard, Jacqueline Gareau avait pu être couronnée championne lors d’une seconde cérémonie protocolai­re.

«Boston fait assurément partie de ma vie, reconnaît la coureuse âgée de 64 ans. C’est l’histoire qui me suit, mais je n’ai jamais voulu être associée uniquement à mes exploits du passé.

«Je suis plus qu’une bonne athlète. Je tiens à apporter quelque chose aux gens, à partager avec eux mes secrets autant sur le plan athlétique que sur mes expérience­s de la vie, dans le cadre de conférence­s.»

On peut d’ailleurs la contacter par l’entremise de son site www.jacqueline­gareau.com.

Tu as été honorée en 2005 afin de rappeler le 25e anniversai­re de ta victoire et on t’invite encore régulièrem­ent à Boston. Es-tu surprise de tout cet intérêt?

«Il faut comprendre que c’est un marathon qui n’est pas comme les autres. Tout le monde rêve d’y participer en raison de sa longue histoire, de son parcours unique et de l’ambiance magique qui règne à Boston. J’aime toujours y retourner. En 2005, on m’avait même invitée à revivre la fin de la course et on m’avait attribué de nouveau la médaille symbolisan­t la victoire. Et dire que c’est Gilles, mon conjoint, qui m’avait encouragée à y prendre part en 1980, après que j’eus triomphé lors de la toute première édition du marathon de Montréal, l’année précédente! Il a toujours été mon ange gardien. Je ne pensais pas l’emporter en 2 h 34 min 28 s à Boston. J’ai ensuite dû délaisser un bon boulot d’inhalothér­apeute à l’hôpital Hôtel-Dieu pour consacrer tout mon temps à ma carrière d’athlète et je ne l’ai jamais regretté. J’ai fait une croix sur une pension... pour vivre ma passion!»

Depuis quand pratiques-tu la massothéra­pie et qu’est-ce qui t’a attirée vers ce métier?

«Une fois ma carrière terminée en 1992, lorsque j’ai donné naissance à mon fils Yannick, mon mari et moi avons été propriétai­res de boutiques de sports de plein air au Colorado avant de revenir au Québec, où nous nous sommes installés dans les Laurentide­s. J’ai besoin de ce contact avec la nature pour me ressourcer. J’ai suivi des cours en massothéra­pie et je pratique ce métier depuis 2005. Je suis tout aussi passionnée que lorsque je courais des marathons. J’ai fait carrière avec mon corps et j’ai appris à bien connaître cette machine. Je pense avoir hérité d’un don pour déceler les problèmes physiques chez mes patients. Mes massages sont thérapeuti­ques, avec des approches énergétiqu­es.»

Peux-tu nous rappeler les circonstan­ces qui t’ont fait rater ta qualificat­ion pour les Jeux olympiques suivants?

«En 1988, j’ai été aux prises avec une grippe tenace qui m’a fait rater ma qualificat­ion pour les Jeux. En 1992,

je me préparais en vue des Jeux de Barcelone lorsque j’ai appris que j’étais enceinte. J’ai eu mon fils à 40 ans et j’ai toujours dit qu’il représenta­it ma médaille d’or. Il a aujourd’hui 24 ans et après avoir été un bon compétiteu­r en ski de fond, il vit maintenant avec sa copine à Canmore, en Alberta.»

Tu as remporté huit marathons au cours de ta carrière et si la victoire à Boston fut la plus spéciale, de même que ta 5e position aux championna­ts du monde de 1983, dirais-tu que ton abandon lors du marathon des Jeux olympiques de 1984 à Los Angeles constitue ta plus grande déception, surtout que c’était la première fois que les femmes pouvaient concourir dans cette épreuve?

«Oui parce que six mois plus tôt, j’avais remporté un marathon sur le même circuit à Los Angeles. Malheureus­ement, j’ai été victime de surentraîn­ement et une blessure aux muscles fessiers est venue me hanter au pire moment. J’ai dû abandonner l’épreuve au 30e kilomètre, à ma très grande déception, en raison d’une crampe aux mollets. Je connaissai­s mal les limites de mon corps à l’époque. Je m’entraînais seule la plupart du temps et j’avais trop poussé la machine. Si j’avais su tout ce que je sais aujourd’hui, cette blessure ne serait jamais apparue. Six mois plus tard, je courais un marathon en 2 h 29 min 32 s à Houston...»

Est-ce que tu cours encore régulièrem­ent?

«Oui, mais les marathons, je crois bien que c’est fini pour moi. J’aime surtout courir dans les sentiers en montagne, près de notre domicile à Sainte-Adèle. J’ai connu des hauts et des bas dans la vie et j’ai acquis cette sagesse qui m’aide aujourd’hui à savoir quand je dois mettre la pédale douce. J’ai toujours pensé qu’un chemin sans obstacle ne mène nulle part. J’ai besoin de bouger, d’être active. Courir produit chez moi l’hormone de la bonne humeur. Un esprit sain dans un corps sain, c’est véridique comme message. J’aime aussi le vélo et le ski de fond. Mon dicton préféré est: «On n’arrête pas de jouer parce qu’on vieillit, mais on vieillit parce qu’on arrête de jouer.»

Peux-tu nous parler des ateliers de course à pied que tu livres encore régulièrem­ent?

«En raison de ma vaste expérience, je pense que je suis bien placée pour fournir de bons conseils aux coureurs afin qu’ils puissent éviter des blessures. J’aime refiler des trucs aux gens pour qu’ils apprennent à courir de façon naturelle. Les exercices d’échauffeme­nt et de stabilisat­ion sont importants. Je livre des conférence­s intitulées L’équilibre pour une santé globale. Bouge et crée ta vie. Rien ne me fait plus plaisir que de partager mes connaissan­ces et mes secrets avec les adeptes de la course à pied.»

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PHOTOS PIERRE DUROCHER ET D’ARCHIVES 1. Jacqueline Gareau continue de courir à 64 ans, notamment dans les sentiers boisés de Sainte-Adèle. 2. Elle travaille depuis 2005 comme massothéra­peute à Sainte-Adèle. Jacqueline tient dans ses mains ses médailles du marathon de Boston. 3. Elle a...

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