Le Journal de Montreal

Les comestible­s attirent les débutants, disent les experts

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Les bonbons et les biscuits au cannabis sont alléchants pour les enfants, mais aussi pour une toute nouvelle clientèle qui n’aurait jamais consommé de pot autrement, avertissen­t les experts.

Depuis la légalisati­on au Colorado, les ventes de produits comestible­s au pot ont plus que doublé entre 2014 et 2015, souligne le rapport du groupe de travail sur la légalisati­on du cannabis, publié en novembre.

«Les données américaine­s montrent que la consommati­on des produits comestible­s est plus importante chez les jeunes hommes et les touristes», renchérit Rebecca Jesseman du Centre canadien de lutte contre la toxicomani­e.

Cela représente un risque puisque cette population possède moins d’expérience avec le cannabis et ne sait pas toujours qu’il faut plus de temps pour ressentir les effets du cannabis ingéré, mais qu’ils durent plus longtemps.

«Après 30 minutes, ils croient que ça ne marche pas et en mangent un deuxième et vont vivre une expérience intense et désagréabl­e», ajoute Mme Jesseman.

Enfants Empoisonné­s

Au Colorado, les hôpitaux ont fait état de cas de surdoses de cannabis et les centres antipoison ont enregistré une hausse d’appels. Sur 1969 cas d'exposition au cannabis chez les enfants de moins de six ans enregistré­s par le Système national de données sur les empoisonne­ments aux États-Unis, entre 2000 et 2013, 75% étaient exposés par ingestion, écrivait le groupe de travail.

Il a fallu que les médias s’intéressen­t à ces dérives pour que l'État impose une dose limite de 10 mg de THC par portion avec un maximum de 10 portions par paquet, et ce, plusieurs mois après la légalisati­on, en 2014.

En comparaiso­n, parmi les produits canadiens que nous avons pu acheter sur internet, certains disaient contenir jusqu’à 30 fois la dose limite.

nouvEllE cliEntèlE

Rodrigue Paré, président du conseil d’administra­tion du Centre québécois de lutte aux dépendance­s (CQLD), craint que la légalisati­on des produits dérivés n’incite une nouvelle clientèle à consommer du cannabis.

Selon lui, le fait de fumer cette drogue représente une barrière importante pour plu- sieurs personnes.

«Le problème avec les bonbons et les gâteaux, c’est qu’il y a toute une population qui ne fumera jamais un joint, mais qui commencera à consommer du cannabis parce que la forme est plus plaisante», explique-t-il. Les produits dérivés seront une porte d’entrée pour une partie de la population qui n’aurait jamais consommé de cannabis.»

«Il n’y a aucune raison pour que ces produits comestible­s soient vendus sous la forme de bonbons», poursuit Mme Jesseman.

Elle est toutefois d’avis que si le gouverneme­nt ne répond pas à cette demande, le marché noir occupera cet espace pour lui.

«Nous souhaitons aussi des emballages neutres qui indiquent clairement et simplement la dose de THC.»

Émilie Dansereau-Trahan, de l’Associatio­n pour la santé publique du Québec, croit que ces produits devraient tout simplement rester interdits.

«Tout ce qui est diversific­ation des produits n’est qu’une stratégie marketing de l’industrie et son but est d’augmenter l’attrait pour ces produits plus faciles à consommer. La légalisati­on ne va pas dans le sens de la réduction des méfaits en santé publique.»

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REBECCA JESSEMAN Directrice

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