Le Journal de Montreal

Solidarité québécoise

- MAthieu Bock-côté mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Depuis toujours, le Québec vit avec une nature difficile. C’est sa condition. D’ailleurs, chaque hiver devient un jour un calvaire. Qui n’a jamais rêvé à l’exil climatique?

La nature, chez nous, n’est pas infernale, elle n’empêche pas la vie non plus que son développem­ent, mais de temps en temps, elle frappe et nous rappelle qu’elle peut balayer ou inonder n’importe quelle constructi­on humaine.

Devant elle, on se sent impuissant.

NATURE

C’était le cas au moment de la crise du verglas de 1998. C’est le cas en ce moment avec ces inondation­s présentes partout sur le territoire.

On nous dira peutêtre que c’est vrai partout sur terre. L’homme moderne se prend pour un dieu, capable de tout maîtriser. La nature lui rappelle sa fragilité.

Mais ces frappes de la nature ont du bon: elles révèlent à quel point la société québécoise est tissée serrée, à la manière d’une grande famille dysfonctio­nnelle qui se rassemble d’un coup quand un de ses membres est en danger.

Elle est belle à voir alors. Les partis s’unissent, les voisins s’entraident, chacun veut aider comme il peut. Quand la nature nous agresse, nous découvrons les vertus de l’union sacrée.

Évidemment, cela n’empêche pas certaines personnes de trancher avec cette belle solidarité qui vient du fond du coeur. Je pense moins ici aux grincheux qu’aux mesquins.

Petit rappel: le député péquiste Pascal Bérubé a félicité le ministre libéral Martin Coiteux pour son appel à l’armée, indispensa­ble pour sauver la situation. Rien de plus normal dans les circonstan­ces. On se tient ensemble. Demain, on reprendra la chicane.

Mais le ministre Gaétan Barrette voyait les choses autrement. Pourquoi ne pas en profiter pour cogner sur les souveraini­stes et faire l’éloge du fédéralism­e?

Alors, il a envoyé le tweet suivant à Pascal Bérubé: «Merci de reconnaîtr­e le très grand avantage d'être au Canada, pays de solidarité face aux épreuves. Ensemble nous sommes plus forts!»

On se pince. C’est vraiment ce qu’il fallait dire dans les circonstan­ces?

Faut-il comprendre que selon le ministre Barrette, un Québec souverain n’aurait pas d’armée et serait incapable d’organiser les secours en cas de crise majeure?

Laissés à nous-mêmes, nous serions une grosse bande d’incompéten­ts?

Sans Ottawa, nous serions condamnés à nous laisser inonder, et même, à nous laisser noyer sans rien faire?

INDÉCENCE

C’est une chose de préférer le fédéralism­e. C’en est une autre de croire son propre peuple incapable. D’où vient ce mépris pour son peuple? D’où tient-il que nous sommes des incapables?

Il y a des gens dans ce gouverneme­nt qui ne se contentent pas d’être fédéralist­es: ils haïssent les souveraini­stes.

Il n’en demeure pas moins que dans l’ensemble, les Québécois se tiennent dans la crise. Ils savent bien que la vie reviendra et reprendra ses droits.

Ils savent que demain viendra le temps du bilan, du désaccord, des insatisfac­tions.

Mais il y a un temps pour chaque chose. En ce moment, c’est celui de la main tendue, des paroles réconforta­ntes, des amitiés improbable­s.

C’est celui de la solidarité québécoise.

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Mais le ministre Gaétan Barrette voyait les choses autrement. Pourquoi ne pas en profiter pour cogner sur les souveraini­stes et faire l’éloge du fédéralism­e ?
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