Le Journal de Montreal

Fête des Mères d’une quasi centenaire

- FRÉDÉRIQUE GIGUÈRE Le Journal de Montréal

La famille d’une Arménienne arrivée à Montréal en 1970 et qui a engendré une cinquantai­ne de descendant­s célèbre aujourd’hui le 100e anniversai­re de leur matriarche à l’occasion de la fête des Mères.

«Je suis nerveuse», a confié Kathoune Yamine Nasri dès l’arrivée du Journal dans sa maison. Avant de commencer l’entrevue, elle a candidemen­t demandé à Louise, son infirmière, de lui apporter une pilule pour calmer ses nerfs.

La femme de 99 ans, qui ne sait ni lire ni écrire, incarne assurément la force tranquille de la famille Nasri. Elle a toujours préféré encourager ses enfants, devenus des entreprene­urs prospères, à défoncer les barrières qui s’élevaient devant eux.

MARIÉE À 14 ANS

Même à 99 ans, pas question pour elle de laisser tomber les perles, les écharpes et les bijoux dorés. Toute sa vie, elle a été guidée par une fierté sans bornes et un désir fidèle de faire rayonner sa famille.

La fervente chrétienne, originaire de Mardin, en Turquie, s’est fait passer la bague au doigt à 14 ans.

«On s’est mariés la première journée qu’on s’est rencontrés. C’était comme ça à l’époque. J’ai eu un mariage arrangé, mais on a fini par développer une belle relation de respect et d’amour», a-t-elle confié.

Après avoir eu neuf enfants, le couple s’est installé à Montréal pour leur assurer un meilleur avenir.

«Je savais qu’ils avaient la fibre entreprene­uriale et je voulais qu’ils fassent de grandes choses», a-t-elle dit.

Ils ont acheté une maison dans Ahuntsic-Cartiervil­le et la nonagénair­e y vit toujours. Un an après leur arrivée, le mari de Mme Nasri est mort d’une crise de coeur. À partir de ce moment, elle a dû s’occuper seule de sa marmaille.

De nature très exigeante, la dame voulait que ses enfants se trouvent du travail vite. Pas question qu’ils sortent dans les bars, qu’ils errent dans les rues du quartier sans raison ou qu’ils participen­t à des tournois improvisés de gambling.

SÉDUITE PAR MONTRÉAL

Née à une époque et dans un pays où les femmes étaient placées au second rang de la société, Mme Nasri n’a jamais eu la chance d’aller à l’école ni de se bâtir une carrière. Elle a rapidement été séduite par les opportunit­és qu’offrait Montréal et par sa modernité et a encouragé ses enfants à se lancer en affaires.

Son souhait le plus cher était que ses descendant­s bénéficien­t du respect et de la reconnaiss­ance qu’elle n’avait jamais eus.

Près de 50 ans plus tard, son rêve a été amplement exaucé. La famille Nasri s’est taillé une place de choix dans le domaine de la mode et a connu du succès à l’internatio­nal. Elle est, notamment, à l’origine des marques Bedo, Nasri Frères et Ça va de soi.

L’élégance et le bon goût de la grande matriarche des Nasri ont aussi inspiré ses enfants à choisir l’industrie de la mode. Celle qui franchira bientôt le cap des 100 ans est catégoriqu­e: sa plus grande fierté demeure la réussite en affaires de sa famille.

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Kathoune Yamine Nasri, qui fête bientôt ses 100 ans, se remémore de bons souvenirs avec ses petits-enfants Léa Rezko et Elie Nasri.

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