Le Journal de Montreal

L’infirmière qui combat la mort au quotidien

Mélanie Caron se fait un devoir d’offrir de petites attentions à ses patients mourants

- Pierre-Paul Biron PierrePaul­Biron

QUÉBEC | Même si elle côtoie la mort au quotidien en accompagna­nt les résidents d’un centre d’hébergemen­t de Québec jusqu’au bout, Mélanie Caron se donne comme mission de leur offrir de derniers moments paisibles qui réconcilie­nt leurs proches avec cette finalité.

L’infirmière du Centre Yvonne-Sylvain l’admet d’emblée, son travail en CHSLD est aux antipodes des fondements mêmes de la profession. «À la base, une infirmière est formée pour sauver des vies, mais ici, on ne sauvera personne, on accompagne», explique Mélanie Caron, qui a accepté ce constat après 19 ans de pratique.

Les résidents sont souvent bien au fait de cette finalité qui vient avec le fait d’entrer en centre d’hébergemen­t. Combien de fois l’infirmière a vu arriver un nouveau patient «venu pour mourir»? C’est dans ces moments difficiles que le travail de Mme Caron et son équipe prend tout son sens.

«C’est la beauté de travailler en hébergemen­t, on a du temps avec eux. Certains traitent des bobos, tandis qu’ici, tout ce qu’on peut faire, c’est s’occuper de la personne», souligne celle qui s’émeut de ce lien fort qui finit par se créer.

DEs DÉtAILs QUI CHANGENt tOUt

Même si le temps peut devenir difficile à trouver avec 39 résidents sous sa responsabi­lité, Mélanie Caron se fait un devoir de connaître leur histoire. «C’est 39 patients, mais aussi 39 familles à comprendre», explique l’infirmière qui admet passer quelques nuits blanches à chercher des solutions pour améliorer le sort de ses patients.

Quand le soleil se lève sur ces nuits sans sommeil, ce sont bien souvent les plus simples attentions qui font la plus grande des différence­s.

Comme cette fois où elle a cherché cette chanson d’Aznavour qui ramenait un patient dans les souvenirs de ses 20 ans en laissant tous ses maux derrière. «C’est ce détail qui a permis d’adoucir le soin qu’on avait à lui donner et de rendre ce moment moins pénible», dit-elle.

Que ce soit de prendre cinq minutes pour s’asseoir et prendre la main d’une résidente ou de trouver cette fameuse chanson, les petites attentions de Mélanie sont ce qui la rend si spéciale. En portant plusieurs autres chapeaux que celui d’infirmière, elle a fait le choix de prendre le temps pour que ses résidents gagnent du temps.

«Parfois, le meilleur des soins, c’est de sortir un album photo que la personne a, mais qu’elle ne peut plus tenir dans ses mains, indique l’infirmière. Quand tu prends sa main après et que tu vois la petite larme qui coule. Tu sais que tu as été là. J’ai compris qu’il ne faut pas baisser les bras, jamais. On ne peut tout simplement pas abandonner ces gens-là à leur sort.»

trAvAIL DE CoeUr

Il suffit de marcher quelques minutes dans les corridors de l’établissem­ent avec Mélanie pour comprendre son quotidien. Sollicitée à gauche et à droite, l’infirmière prend le temps pour tous avec délicatess­e et surtout avec ce sourire empreint de passion pour l’humain.

«On est en mode perte ici, on ne peut pas se le cacher. Ils ont perdu leur maison, leur autonomie. Donc, on doit rentrer le matin en mettant notre coeur sur le coin de la table, prêt à se donner, dit-elle. Il n’y a pas d’autre façon de travailler pour moi.»

 ??  ?? Mélanie Caron travaille au Centre Yvonne-Sylvain de Québec depuis 12 ans, où elle accompagne des patients en fin de vie. Elle admet passer des nuits blanches à chercher des solutions pour améliorer le sort de ses patients.
Mélanie Caron travaille au Centre Yvonne-Sylvain de Québec depuis 12 ans, où elle accompagne des patients en fin de vie. Elle admet passer des nuits blanches à chercher des solutions pour améliorer le sort de ses patients.
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