TRAHI PAR SES COURRIELS
Comment Gaétan Lelièvre demandait des cadeaux
Le député et ex-ministre du Parti québécois a sollicité et obtenu de nombreux avantages de la part d’une firme qui recevait des millions de dollars de contrats publics, alors qu’il était directeur général de la Ville de Gaspé.
Le député et ex-ministre du Parti québécois Gaétan Lelièvre a sollicité et obtenu de nombreux avantages de la part d’une firme qui recevait des millions de dollars de contrats publics, alors qu’il était directeur général de la Ville de Gaspé.
S’il a nié, à la commission Charbonneau, avoir reçu des cadeaux en échange de contrats, M. Lelièvre peut difficilement nier, à tout le moins, avoir reçu des cadeaux.
Dans certains cas, il les a lui-même demandés, selon des courriels datés de 2008 et 2009 consultés par notre Bureau d’enquête.
Les documents en disent long sur la proximité entre Lelièvre et un ingénieur responsable du développement des affaires pour la firme d’ingénierie Roche, Martin Lapointe.
À l’époque, Roche venait d’obtenir sans appel d’offres un mandat pour concevoir les travaux de réfection des infrastructures dans le secteur Rivière-au-Renard, à Gaspé. L’ensemble du projet était évalué à 50 M$. La firme travaillait activement pour obtenir un autre contrat pour la rénovation de deux usines d’eau potable, qu’elle n’a finalement pas eu.
BATEAU ET CONDO
Les courriels démontrent qu’en 2008 et 2009, alors qu’il était le plus haut fonctionnaire à Gaspé: √ Gaétan Lelièvre a demandé et obtenu de Roche
des billets au Centre Bell pour son fils; √ il a demandé un coup de pouce des cadres de
Roche pour vendre son bateau; √ il a bénéficié gratuitement d’un condo appartenant à Martin Lapointe; √ il a effectué des démarches pour louer son appartement de Gaspé à des employés de Roche. La proximité était telle que Lapointe invitait Lelièvre à passer «une petite soirée de gars» avec lui (voir extraits ci-contre).
COMMISSION CHARBONNEAU
Les communications entre Martin Lapointe et un vice-président de Roche, André Côté, laissent comprendre qu’ils avaient avantage à gâter Lelièvre, car ils espéraient décrocher d’autres contrats.
Dans une déclaration assermentée qu’il a expédiée à la commission Charbonneau en 2015, Lelièvre était beaucoup moins explicite au sujet de ses rapports de proximité avec Roche. Il martelait n’avoir jamais reçu de «gratification, récompense, avantage» en retour de contrats accordés à Roche.
L’ex-maire de Gaspé, François Roussy, a été arrêté l’an dernier, et accusé de complot et abus de confiance, notamment en raison de ses liens avec Roche.
Pour sa part, M. Lelièvre, qui est député de Gaspé depuis 2012 et qui a été ministre délégué aux Régions de 2012 à 2014, n’a jamais été arrêté ni accusé dans ce dossier.
Lorsque notre Bureau d’enquête a demandé la version des faits de M. Lelièvre, le Parti québécois a répondu que ce dernier avait déjà tout dit dans son affidavit à la commission Charbonneau. «On ne fera donc pas de commentaires pour l’instant.» Martin Lapointe a refusé de commenter. – Avec la collaboration de Marie Christine Trottier