Le Journal de Montreal

Une fête sans famille pour les soeurs Dionne

Les deux dernières des quintuplée­s Dionne en vie se sentent abandonnée­s

- CAMILLE GARNIER

Annette et Cécile Dionne, les dernières des célèbres quintuplés à être en vie fêteront leur 83 ans ensemble, mais sans leurs enfants qui ne les visitent plus.

«Il n’y a rien de plus ingrat qu’un enfant», confie avec amertume Cécile Dionne, qui s’apprête à fêter ses 83 ans en allant au restaurant avec sa soeur comme chaque année.

En effet, si Cécile et Annette ont respective­ment quatre et trois enfants, elles ne reçoivent pour ainsi dire aucune visite.

Une situation difficile à vivre pour les deux dernières des quintuplée­s Dionne encore en vie, qui ont fait l’objet jusqu’à leurs neuf ans d’une immense médiatisat­ion et d’un commerce lucratif.

«Pour ne pas trop souffrir, j’ai ma technique: quand ils sont avec moi, je les aime gros gros, pis quand ils ne sont pas là, je ne les aime plus», explique Annette qui n’a vu aucun de ses trois fils depuis longtemps.

«Je me suis habituée à ne pas les voir. Un de mes fils m’a dit: “Maman, je n’ai plus le temps de te visiter.”»

Cécile aussi ne voit que rarement ses enfants.

«J’ai trois garçons et une fille. Ma fille vient de temps en temps, mais c’est la seule.»

«Mon garçon, celui dont j’étais le plus proche, a dépensé tout mon argent et je ne l’ai jamais revu. C’est douloureux.»

MÈRES AIMANTES

Annette et Cécile trouvent cette situation d’autant plus injuste qu’elles ont toujours fait le maximum pour leurs enfants.

«J’étais seule pour les élever, leur père n‘était jamais là, confie Annette. Je pense que j’ai été assez brave.»

Elle qui a grandi en «autarcie» dans l’environnem­ent aménagé de Quintland, le parc d’attraction­s consacré aux soeurs Dionne, a voulu permettre à ses petits de voir le monde.

«Je les laissais sortir, rentrer tard le soir ou aller veiller chez des amis. Je leur disais d’en profiter, car moi je n’ai pas eu cette chance. C’était ma manière de réparer cette terrible enfance dont on souffre encore.»

Les soeurs Dionne espèrent d’ailleurs que le gouverneme­nt canadien assumera dans les prochaines années le financemen­t du musée qui abrite leurs souvenirs en Ontario.

«Cela fait des mois que nous réclamons de l’aide sans obtenir de réponse. On veut conserver cet endroit pour que les gens se souviennen­t de notre histoire», explique Annette.

Contactée par Le Journal, la porte-parole du ministère du Patrimoine canadien affirme qu’aucune demande de financemen­t n’a été déposée.

PIANO ET LECTURE

Pour mieux vivre avec leur lourd passé, les deux soeurs se plongent aujourd’hui dans la musique et la lecture.

«J’adore jouer du piano, affirme Annette avec enthousias­me. Avec mes problèmes de vue, c’est difficile, mais je m’accroche.»

Cécile, elle, participe à des ateliers de lecture.

«C’est mon passe-temps favori. J’ai lu tellement de livres que je ne saurais même pas vous dire lequel j’ai préféré.»

Malgré ces occupation­s le souvenir de leur enfance douloureus­e revient régulièrem­ent hanter les deux soeurs.

«J’y pense surtout le soir dans mon lit, avoue Annette. Dans ces cas-là, j’appelle ma soeur et on parle au téléphone toute la soirée. On peut compter l’une sur l’autre.»

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Annette (à gauche) et Cécile (à droite) Dionne déplorent l’absence de leurs enfants.

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