Le Journal de Montreal

Elle doit faire faillite malgré un bon salaire

- Emmanuelle Gril Collaborat­ion spéciale

Malgré sa situation financière stable et un bon salaire, Caroline s’est laissé happer par la spirale de l’endettemen­t. Sa séparation avec son conjoint finit par causer un déséquilib­re financier supplément­aire qui la force maintenant à faire faillite.

Caroline et Jacques, qui sont tous deux policiers, ont eu trois enfants durant leurs 12 ans de vie commune. Bénéfician­t d’un revenu confortabl­e de 80 000 $ annuelleme­nt chacun et d’une bonne sécurité d’emploi, ils voyaient l’avenir d’un bon oeil et n’ont pas résisté à l’appel de la consommati­on. Peu à peu, ils ont gonflé leur marge de crédit jusqu’à 30 000 $ auxquels se sont ajoutés 17 000 $ sur leurs cartes de crédit. «Tout semblait beau en apparence, car le couple n'avait pas de difficulté à rembourser les 1400 $ par mois nécessaire­s au paiement minimum. Mais cela aurait pourtant dû constituer un premier signal d’alarme», indique Pierre Fortin, syndic autorisé en insolvabil­ité, président de Jean Fortin et Associés.

TOUT S’EMMÊLE…

Malgré un endettemen­t croissant, le couple succombe encore aux sirènes de la consommati­on… Ainsi, Jacques décide de s’offrir un VTT, qu’il achète usagé à un coût de 12 000 $. Sa banque hésite à lui accorder ce crédit supplément­aire et exige que Caroline cosigne le prêt. Autrement dit, elle devient responsabl­e à 100 % de la dette, au même titre que son conjoint, et ce, peu importe à qui appartient le VTT et qui l’utilise.

De son côté, elle décide de changer son véhicule, financé sur sept ans et pas encore payé dans sa totalité. Mais qu’à cela ne tienne, le concession­naire propose de reprendre l’ancienne voiture et de transférer le solde dû sur le nouveau prêt. Résultat: Caroline paye mensuellem­ent un montant de 760 $, car même si son Santa Fe flambant neuf coûte 33 000 $ (soit 510 $/mois), elle se retrouve avec un prêt automobile de 52 000 $!

«C’est un phénomène que l’on voit de plus en plus souvent: les gens financent leur véhicule sur sept ans afin de réduire les paiements, mais ils le remplacent au bout de quatre ou cinq ans parce qu’ils commencent à coûter cher en réparation­s, ou parce qu’un vendeur talentueux les a convaincus qu’ils devraient posséder le dernier modèle.»

IMPOSSIBLE D’ÉCHAPPER À LA FAILLITE

Pour couronner le tout, Caroline et Jacques décident de se séparer. Aux prises avec des dettes auxquelles elle ne peut faire face, en plus du prêt du VTT que son ex-conjoint décide de ne plus rembourser, elle doit se résoudre à faire faillite. «Le ratio d’endettemen­t du couple était de 34 %, mais une fois seule, celui de Caroline grimpe à 66 %. Une situation intenable», mentionne Pierre Fortin.

Sa priorité était de pouvoir conserver la maison, puisque ses trois enfants sont très attachés à leur quartier. Elle a heureuseme­nt pu garder celle-ci, car la Loi sur la faillite et l’insolvabil­ité permet à une personne de conserver sa résidence si la valeur de celle-ci n’est guère plus élevée que le solde hypothécai­re. «C’était le cas de Caroline, et son créancier hypothécai­re a accepté qu’elle puisse racheter la part de Jacques et conserver la maison», mentionne M. Fortin.

Dans le cadre de la faillite, elle a remis le VTT et le Santa Fe aux créanciers, et a pu aussi se libérer des remboursem­ents des marges et des cartes de crédit qui l’étranglaie­nt financière­ment. Elle loue désormais une automobile à un prix beaucoup plus raisonnabl­e (350 $/mois).

«Se séparer est toujours très difficile sur le plan émotif, mais cela constitue aussi un défi colossal sur le plan financier. Caroline a passé des moments difficiles, elle devra continuer de gérer son budget avec discipline, mais dans quelques mois, elle sera sortie de sa faillite avec un budget équilibré et, surtout, avec sa maison», conclut M. Fortin.

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