Le Journal de Montreal

Andrew Scheer le sympathiqu­e

- MARIO DUMONT

Andrew Scheer possède plusieurs qualités pour tenir tête au populaire premier ministre Justin Trudeau. Son côté sympathiqu­e, naturellem­ent rassembleu­r, peut compenser l’avantage Trudeau, qui demeurera le maître du show-business devant les caméras.

Une question sensible pollue sa victoire spectacula­ire au leadership conservate­ur: a-t-il dû faire un pacte avec la droite sociale et religieuse pour franchir la barre et devenir chef? A-t-il dû faire des promesses de réouvertur­e d’un débat comme celui de l’avortement pour gagner?

Les gens respectero­nt les conviction­s personnell­es de monsieur Scheer. Les gens comprennen­t aussi qu’un gagnant d’élection est soutenu par une coalition de diverses tendances. Nul ne peut raisonnabl­ement demander à quelqu’un à la recherche d’appuis de cracher sur des supporters. Cependant, un candidat ne doit jamais se mettre le bras dans un tordeur irréversib­le…

LE QUÉBEC

Au Québec, nous sommes particuliè­rement allergique­s à voir des questions poussées par des groupes religieux se retrouver au centre des priorités politiques. Le nouveau chef conservate­ur sera constammen­t interrogé là-dessus. Il sera traité comme suspect.

Ses adversaire­s libéraux vont aussi s’appliquer à le définir comme un conservate­ur social et religieux. Des photos d’affiches brandies lors d’une manifestat­ion pro-vie et invitant à voter Scheer circulent déjà. Fiez-vous à la puissante machine de communicat­ion libérale pour tracer un portrait peu flatteur de lui avec ce qu’ils auront sous la main.

Le chef élu assure qu’un gouverneme­nt sous son leadership ne rouvrirait pas des questions comme le droit à l’avortement. Cependant, les militants pro-vie ont célébré si ouvertemen­t sa victoire que des observateu­rs se demandent à quoi ceux-ci s’attendent. À tort ou à raison, ils ont l’air de penser que Andrew Scheer va leur ouvrir une porte.

TEST DE LEADERSHIP

Maintenant, Andrew Scheer a gagné. Il devra poser un geste pour prouver sur la place publique qu’il ne doit rien à personne. Il devra faire une démonstrat­ion qu’il a les mains libres vis-à-vis des groupes religieux ou dogmatique­s. Il doit mettre le pied à terre et faire la preuve rassurante qu’une fois élu, il ne serait pas le cheval de Troie par qui la droite morale remettrait ses obsessions à l’ordre du jour.

Andrew Scheer pourrait bien avoir des occasions à court ou moyen terme de casser cette perception. Ses adversaire­s vont vouloir le piéger en mettant sur son chemin des votes sensibles sur des questions morales. On voudra diviser son caucus et faire ressortir l’émergence d’une droite sociale sous son leadership.

C’est à ce moment qu’il devra démontrer force et fermeté pour s’éloigner de cette faction. Il devra faire du judo avec les pièges tendus et s’en servir pour rassurer la population. Quitte à décevoir certains appuis issus de la droite sociale de l’Ouest canadien. De toute façon, ces gens vont voter pour qui d’autre?

Au Québec, les conservate­urs ont beaucoup de chemin à faire. Le message de Andrew Scheer sur les finances publiques, les taxes et les familles pourrait bien intéresser les Québécois et fournir une solution de rechange valable aux libéraux. Mais la clarificat­ion de sa position sociale est requise pour garder les oreilles ouvertes.

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Ses adversaire­s libéraux vont s’appliquer à le définir comme un conservate­ur social et religieux.
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