Le Journal de Montreal

« Une situation très triste »

- richard Martineau richard.martineau@quebecorme­dia.com

Avez-vous lu les déclaratio­ns des politicien­s canadiens et québécois au lendemain de l’attentat islamiste de londres?

«Une attaque répréhensi­ble», «Des actes d’une violence ignoble», «Une situation très triste», «Des forcenés ont foncé en voiture dans la foule», «Des gestes incompréhe­nsibles et révoltants»…

UNE PURE COÏNCIDENC­E

Rien sur l’idéologie qui animait les attaquants. Pas un mot. Comme si la cause n’était pas importante.

Comme si les criminels n’étaient motivés par aucune doctrine, aucun système de pensée, aucune croyance, aucun dogme.

Ils ont foncé sur des innocents, c’est tout. Un moment de folie, j’imagine. Ça peut arriver à tout le monde.

Probableme­nt la faute au capitalism­e, tiens. Ou au racisme ambiant. «Shit happens», comme disent les Anglais.

On regarde les nouvelles, on hoche la tête et on continue de lire Gin tonic et concombre. Surtout, pas d’amalgame! Le fait que la plupart des attentats qui ont fait couler le sang au cours des dernières décennies aient été commis par des fous d’Allah n’est que pure coïncidenc­e.

Il ne faut pas en tirer la moindre conclusion.

Tout cela aurait pu être commis par des cathos extrémiste­s, tiens, ou des bouddhiste­s. AuCunE CAuSE, AuCun moTIF

J’imagine qu’Amir Khadir et ses petits amis vont encore nous dire que les Anglais n’ont eu que ce qu’ils méritaient.

Qu’ils n’avaient qu’à se mêler de leurs affaires.

Que tout ça est de la faute de leur passé colonialis­te.

Que l’Occident n’a qu’à laisser l’Orient tranquille.

Que lorsqu’on crache en l’air, ça finit toujours par nous retomber sur le nez.

Que le terrorisme est l’arme des pauvres, des déshérités.

Que lorsqu’on sème le vent, on récolte forcément la tempête.

Que les Occidentau­x sont toujours coupables, même lorsque c’est leur sang qui coule.

«Nos pensées accompagne­nt les victimes de l’attentat de Londres et leur famille», a écrit Justin Trudeau hier.

Quand un forcené abat des musulmans dans une mosquée à Québec, on n’hésite pas une seconde pour définir cet attentat: c’est un attentat raciste, causé par l’extrême droite, les radios poubelles, l’exclusion, l’islamophob­ie, la charte des valeurs, le nationalis­me, la xénophobie, le populisme, la démagogie, les tabloïds…

Mais quand c’est un islamiste qui massacre des innocents au nom de sa religion, c’est un attentat, point.

Pas d’adjectif, pas de cause, pas de motif.

Personne qui ait mis le feu à la mèche ou soufflé sur les braises de l’intoléranc­e religieuse.

C’est une catastroph­e, c’est tout.

Comme une inondation ou un tremblemen­t de terre.

LA VIE CONTINUE

Comme l’a écrit Christian Rioux dans Le Devoir au lendemain de l’attaque de Manchester, le plus triste est que nous sommes en train de nous habituer.

Nous tournons la page de plus en plus vite.

Nos élans de colère sont de plus en plus courts.

Comme si l’anormal était en train de devenir normal.

Ça fait dorénavant partie de notre vie quotidienn­e.

C’est avec tristesse et consternat­ion, blablabla. Nous sommes de tout coeur avec les familles des victimes, blablabla. Des actes répréhensi­bles et inexcusabl­es, blablabla.

Et après la pause, un humoriste ou une auteure de chick lit viendra nous dire que tout ça est de la faute des méchants islamophob­es…

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