Le Journal de Montreal

Un avocat puni par la cour à cause de son nouveau-né

Il avait demandé un report afin d’aider sa femme qui venait d’accoucher

- MICHAËL NGUYEN

« POURJE N’AI ÊTRE PLUS CERTAIN DEMANDÉDE NE DE PAS REMISE ÊTRE PÉNALISÉ PAR D’AUTRES JUGES. JE NE VOULAIS PAS PÉNALISER MA FAMILLE À CAUSE DE MA PATERNITÉ »

– Me George Calaritis, avocat

La Cour supérieure a annulé des frais imposés par un juge municipal à un avocat qui demandait de reporter un dossier afin de s’occuper de son nouveau-né.

«Aucun autre résultat que le refus de condamner Me George Calaritis […] ne serait possible», a tranché la juge Chantal Masse, en renversant un jugement rendu sept mois plus tôt.

Cette décision a fait pousser un soupir de soulagemen­t à Me Calaritis, qui avait en vain tenté de concilier le travail et sa famille en novembre dernier.

C’est que le 15 novembre, il devait se présenter à la cour municipale de Montréal pour défendre un client. Or, sa femme avait accouché huit jours plus tôt.

PÉNALITÉS

Quelques jours avant l’audience, l’avocat avait prévenu la Couronne qu’il demanderai­t une remise pour pouvoir être aux côtés de son épouse et de son nouveau-né. Et il a dépêché une stagiaire pour faire part de la situation au tribunal. Le juge Stéphane Brière ne s’est pas opposé à la remise, mais il a du même coup condamné l’avocat à payer les «frais du jour», ce qui représente environ 100 $.

Me Calaritis comptait prendre deux ou trois semaines de congé parental, mais cette décision a chamboulé tous ses plans, explique-t-il.

«Par la suite, je n’ai plus demandé de remise pour être certain de ne pas être pénalisé par d’autres juges, raconte-t-il. Je ne voulais pas pénaliser ma famille à cause de ma paternité.»

L’avocat explique qu’il a ainsi continué à travailler, malgré la fatigue inhérente à la naissance d’un bébé.

Comme Me Calaritis était à la cour durant la journée, c’est son beau-père qui a dû se libérer pour aider sa femme à s’occuper du nouveau-né.

«Heureuseme­nt que mon père était là», a commenté Vera Kazantzidi, l’épouse de Me Calaritis.

PAR PRINCIPE

Convaincu que le juge municipal ne pouvait pas le pénaliser en raison de sa paternité, l’avocat a porté en appel ce jugement. Pas pour l’argent, dit-il, mais par principe. Il n’a d’ailleurs demandé aucune compensati­on.

«Il est important que les tribunaux reconnaiss­ent l’importance des phénomènes liés à la conciliati­on travail-famille des mères et pères qui pratiquent comme avocats en défense», peut-on lire dans la demande d’appel pilotée par Me Louis-Nicholas Coupal, du cabinet Coupal Chauvelot.

TRAVAIL-FAMILLE

La Cour supérieure du Québec a finalement donné raison à l’avocat et a annulé l’amende séance tenante.

Dans le jugement, la juge Chantal Masse affirme que «les circonstan­ces permettant exceptionn­ellement de condamner un avocat» ne sont pas réunies.

«C’était à la fois une question de conciliati­on travail-famille et un enjeu d’accessibil­ité à la justice», a conclu Me Coupal, ajoutant que ce genre de pénalités pourrait rendre frileux des avocats de la défense, de peur d’être eux-mêmes condamnés si un imprévu survenait dans leur vie personnell­e.

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PHOTO COURTOISIE Me George Calaritis a vu la Cour supérieure annuler sa condamnati­on, parce qu’il voulait s’occuper de son nouveau-né.

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