Pot moins cher au Québec
La province ne peut pas trop taxer le cannabis si elle veut reprendre le marché
OTTAWA | Le Québec n’aura d’autre choix que de taxer faiblement le pot lorsqu’il sera légalisé, car c’est déjà sur le marché noir d’ici que cette drogue se vend le moins cher au pays.
Ce ne sont finalement pas seulement la bière et l’électricité qui coûtent moins cher au Québec qu’ailleurs au Canada, selon une nouvelle étude commandée par Sécurité publique Canada pour évaluer le prix du cannabis au pays à l’aube de la légalisation. C’est au Québec qu’il faut débourser le moins pour en obtenir.
En effet, alors que les Canadiens payent en moyenne 7,04 $ le gramme de cannabis de qualité «moyenne», les Québécois doivent débourser seulement 5,33 $ pour le même produit.
Une différence qui s’expliquerait surtout par le nombre faramineux de producteurs illégaux qui sont apparus au fil des décennies en raison de l’avènement de l’équipement hydroponique.
«Les résultats de l’analyse donnent à penser que le cannabis de qualité élevée tend à se vendre à un prix plus faible au Québec et en Colombie-Britannique, des provinces bien connues pour la production illégale à grande échelle», expliquent les auteurs du rapport publié la semaine dernière.
ÉVITER D’AUGMENTER LES PRIX
Alors que c’est aux provinces de décider, d’ici l’été prochain, du prix et des taxes qu’il imposera, les experts préviennent que le coût devra rester bas pour éviter que les consommateurs continuent à s’approvisionner auprès du marché noir.
«Le cannabis ne doit certainement pas être vu comme une vache à lait. Compte tenu du bas prix du produit au Québec, le gouvernement devrait donc éviter de le taxer, ou du moins le taxer très peu afin que le prix soit compétitif avec les vendeurs illégaux», analyse Ken Lester, professeur de finances à l’Université McGill.
«Le gouvernement pourrait s’inspirer de l’Uruguay, qui a mis des taxes extrêmement basses au départ pour tuer le marché noir. Après, il peut augmenter le coût légèrement pour récupérer le coût de la mise en place du système de vente du pot», ajoute pour sa part Émilie Dansereau, de l’Association pour la santé publique du Québec.
MEILLEURES DONNÉES
Or, le gouvernement manque de données précises pour bien mesurer les prix du cannabis sur la rue et la quantité qui se vend, prévient-on dans le rapport commandé par Ottawa pour 74 000 $.
Les auteurs ont même dû se fier au site PriceOfWeed.com pour la majorité de leurs données. Ce site permet aux utilisateurs de rapporter où ils ont acheté du pot, quelle quantité et quel prix.
«Le manque de données empiriques est préoccupant […] Actuellement, la collecte de données est tout simplement insuffisante pour permettre aux chercheurs et aux décideurs d’évaluer l’incidence de la légalisation du cannabis sur le comportement des consommateurs de cannabis», déplorent les auteurs.