Le Journal de Montreal

« C’EST LUI LE BOSS »

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Une des premières choses que Rafiul Haque veut qu’on sache sur lui, c’est qu’il est «prétentieu­x». «Vous pouvez écrire: très beau jeune homme», dit-il en pointant le carnet sur lequel ses citations sont notées.

«Demandez à toutes les filles de la classe: elles savent que je le sais. Je le sais très bien que je suis beau. Je remercie mes parents», rigole l’adolescent. «Je suis prétentieu­x et je n’ai pas peur de le dire.» Mais quand on creuse un peu, son discours sur ses camarades, sur lui-même et sur la vie, est loin d’être superficie­l.

Rafiul est fier. Fier de son équipe de soccer, dont il est le capitaine. Fier de son école. «Moi je dis que vous êtes malchanceu­se de ne pas être allée à Pierre-Dupuy», déclare-t-il.

Il est fier de ses origines et de sa famille. Ses parents sont arrivés du Bangladesh dans les années 1990. Son frère aîné est né là-bas. Lui, son autre grand frère et ses soeurs jumelles de 14 ans sont tous nés ici. Son père est gérant pour un fournisseu­r de tabac, sa mère travaille dans un magasin de vêtements tout en suivant des cours de français afin de pouvoir un jour ouvrir sa propre garderie. Rafiul est fier que ses parents soient fiers de lui. «Lors du gala méritas, le sourire qu’ils avaient dans la face, je n’avais jamais vu ça de ma vie», se souvient-il.

DONNER DE LA CONFIANCE AUX AUTRES

«Je crois que c’est de ça qu’on a besoin, de confiance en soi, si on veut avancer dans la vie, explique-t-il. Quand je dis que je suis bon, ce n’est même pas pour que les autres le sachent. Je le répète beaucoup pour moi-même.»

Il se dit d’ailleurs sensible à ceux qui n’ont pas la même confiance que lui. «Je le sais qu’il y en a qui ont des problèmes dans la vie, et ça me fait mal.»

L’idée que quelqu’un dans sa classe pourrait penser au suicide le préoccupe. «Je ne peux même pas imaginer la douleur…», commence-t-il sans terminer sa phrase.

Il remarque parfois que certaines filles de sa classe ont l’estime de soi chancelant­e. «Je fais exprès de leur rappeler, de leur dire: “Eh, t’es belle.” Et je m’en vais.

«Quand j’en vois qui sont isolés ou de mauvaise humeur, je prends une chaise et je leur demande: “qu’est-ce qu’il y a?” […] Si quelqu’un s’absente de l’école, je le texte: “t’es où?” J’ai le numéro de tout le monde», dit-il.

Ses enseignant­s le qualifient de leader positif, un rôle qu’il assume totalement. «Rafiul dit souvent que c’est lui le boss», rapporte son ami Jimmy Lam. Grandement engagé, il fait partie de plusieurs comités de finissants et dit fouiner même dans ceux dont il ne fait pas officielle­ment partie.

«Il est tellement responsabl­e. Des fois, j’oublie que c’est un élève», avoue le technicien en loisirs Sergio D’Amendola.

VITESSE

Fanatique de soccer, il invite ses camarades à venir voir jouer son équipe en grand nombre chaque fois qu’il y a un match. Son idole est le joueur portugais Cristiano Ronaldo. Devenir joueur profession­nel est son plus grand rêve. À l’automne, il tentera d’ailleurs de se faire recruter par l’Impact lors d’essais ouverts au public.

S’il est pris, il ira au cégep à temps partiel faire ses cours de tronc commun. Sinon, à temps plein en sciences de la nature. Sa matière préférée est les mathématiq­ues. «Quand tu comprends, tu peux faire n’importe quel numéro. C’est comme un jeu auquel on fait juste ajouter de nouveaux règlements. Bon, quand je dis ça, j’ai des amis qui disent que je suis un peu coucou», convient-il.

Cet intérêt pour les chiffres va de pair avec une fascinatio­n qu’il a pour la vitesse. «Je suis passionné d’autos. Je veux savoir comment ça fonctionne. Je veux pouvoir apporter des modificati­ons moi-même à ma voiture», dit celui qui se verrait bien comme ingénieur mécanique.

Il s’imagine avoir une belle maison, avec une belle famille et un chien. «Comme dans les films, quoi.»

Il n’a pas de copine pour l’instant, mais ça ne l’inquiète pas. Il se dit sélectif.

«J’aime ma vie», conclut-il.

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RAFIUL HAQUE 17 ans, le leader Dans 10 ans, il se voit joueur de soccer profession­nel ou ingénieur mécanique, avec une famille, une maison en banlieue, un chien et beaucoup d’argent. JIMMY LAM 17 ans, l’observateu­r Dans 10 ans, il se voit...

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