Cannabis : la sagesse Mulcair
Dans cette semaine d’entrevues de fin de session avec les chefs politiques, j’ai été frappé par l’énorme dose de bon sens et de sagesse de Thomas Mulcair sur la question du cannabis. J’avais déjà entendu la position du NPD, mais je dois confesser que je ne m’étais pas sérieusement arrêté à écouter l’argumentaire complet. Pourtant, cette approche mérite notre attention.
L’un des drames d’un parti politique qui connaît une traversée du désert, c’est la perte d’intérêt du public. Même les bons coups finissent par passer inaperçus. C’est précisément ce qui arrive au NPD ces mois-ci. Thomas Mulcair est un chef en sursis. Le parti se relève péniblement de la défaite électorale. Difficile de récolter le mérite, même pour des interventions pertinentes.
Je résume la position des néo-démocrates. Plutôt que de pousser à fond les gaz sur la légalisation dans un calendrier accéléré, le NPD répondrait favorablement aux demandes des provinces qui veulent un report de la date du 1er juillet 2018. Il n’y a pas de réelle urgence à légaliser complètement. Il faut prendre le temps de bien faire les choses.
DÉCRIMINALISER D’ABORD
En contrepartie, le NPD aurait préconisé de décriminaliser la possession simple de marijuana dès le début du mandat. Cette première étape aurait pour effet de remplir une partie des objectifs du gouvernement Trudeau, notamment d’éviter de voir des jeunes se retrouver avec un casier judiciaire pour une action qui deviendra légale sous peu.
Une telle décision provoquerait du même coup un désengorgement des tribunaux. Au moment où l’arrêt Jordan menace de laisser non punis des crimes graves en raison des délais déraisonnables, est-il logique que des milliers de dossiers de cannabis se retrouvent encore devant les juges?
ÇA PRESSE !
Pour l’heure, le gouvernement Trudeau n’entend pas ce message et fonce tête baissée avec une légalisation complète dans un an. Les provinces sont aux prises avec les complications de la commercialisation, avec les problèmes sociaux, avec les risques pour la sécurité routière et avec les enjeux de santé publique. Elles trouvent le délai bien court.
Mais Justin Trudeau a maintenu la ligne dure cette semaine encore. Il l’a promis, il a fixé une date, et rien n’y fera. Il semble que les stratèges autour de monsieur Trudeau fassent le calcul que cette promesse a plu aux jeunes et les a ralliés à leur parti. Pas question de les désappointer.
Pourtant, le gouvernement reçoit les avertissements les plus sérieux qu’on puisse imaginer. Les psychiatres du Québec considèrent que la vente ne devrait pas être permise aux moins de 21 ans. Ils craignent des hausses marquées des cas de psychose. Ils s’appuient sur des données scientifiques concernant le développement du cerveau.
De leur côté, les médecins d’urgence appuient ce seuil de 21 ans. Ils craignent aussi les problèmes de santé mentale, mais aussi plus de cas d’asthme et d’hyperémèse, une source de nausées et de vomissements. Eux reçoivent des cas chaque jour dans les hôpitaux.
Ces mises en garde de médecins mériteraient au moins qu’on s’arrête pour écouter et réfléchir.