Le Journal de Montreal

Prédire l’imprévisib­le

- MARC marc.defoy@quebecorme­dia.com DE FOY

CHICAGO | La scène était belle à voir, hier matin. Evan Barratt, un joueur de centre provenant de l’équipe américaine des 18 ans, pleurait à chaudes larmes sous les applaudiss­ements et les cris de sa famille pendant qu’il descendait vers le plancher du United Center. À son arrivée, un représenta­nt des Blackhawks de Chicago lui a remis un chandail qu’il a revêtu avec émotion.

Le jeune homme venait d’être repêché du 90e rang de la séance de repêchage de la Ligue nationale de hockey, c’est-à-dire en troisième ronde.

Depuis ce grand moment, il entrevoit l’avenir avec optimisme. Il rêve au jour où il sautera sur la glace du United Center avec l’uniforme des Blackhawks sur le dos. Mais il reste à voir comment il se développer­a d’ici là.

Il en est ainsi pour les 216 autres joueurs qui ont été repêchés en fin de semaine. Pour plusieurs d’entre eux, le chandail qu’ils ont endossé avec grand bonheur devant parents et amis deviendra un souvenir qu’ils n’auront porté qu’une fois.

Barratt sera peut-être du nombre. S’il ne cède pas à l’ambition de faire le saut dans les rangs profession­nels avant la fin de ses études, il aura la chance d’avoir en main un diplôme de l’Université Penn State, où il jouera à compter de la saison prochaine.

POURQUOI PAS À 19 ANS ?

Le repêchage de la LNH diffère de ceux des autres sports nord-américains.

Les équipes choisissen­t des jeunes en fin d’adolescenc­e. Les surdoués sont les seuls joueurs détenant un certificat de fiabilité assuré. Les autres viennent sans garantie.

Les projection­s sont difficiles, pour ne pas dire pratiqueme­nt impossible­s.

«Nous avons à choisir des joueurs qui sont encore en développem­ent», dit Jim Rutherford, directeur général des Penguins de Pittsburgh.

«On ne sait pas ce qu’ils deviendron­t dans deux ou trois ans.»

Dans cette optique, certains estiment que l’âge d’admissibil­ité du repêchage devrait être repoussé à 19 ans. L’ancien joueur de centre étoile Pat LaFontaine, qui occupe un poste exécutif avec la LNH, a fait cette suggestion il y a quelques années.

L’idée a fait beaucoup jaser, mais n’a pas été retenue. Ce serait logique pourtant.

«J’aimerais que l’on puisse repêcher les joueurs à 19 ans, continue Rutherford.

«Mais je ne sais pas si une volonté existe en ce sens. Vous ne parlez pas à la bonne personne. Par contre, je ne sais pas si on peut retourner en arrière. On perdrait pratiqueme­nt une année de repêchage si on décidait d’aller de l’avant avec une telle formule.»

UNE RONDE POUR LES JOUEURS DE 18 ANS

La formule comportera­it des implicatio­ns juridiques puisqu’elle viendrait à l’encontre de la charte des droits de la personne. Mais ce problème pourrait être contourné, pense-t-on, en permettant aux joueurs de 18 ans d’être repêchés en première ronde seulement.

«Il y eut une époque où les joueurs de 18 ans étaient sélectionn­és exclusivem­ent au premier tour, se rappelle Peter Mahovlich, ancien joueur de centre du Canadien à l’emploi des Panthers de la Floride à titre de recruteur profession­nel.

«On enchaînait avec les joueurs de 19 ans à partir de la deuxième ronde. Revenir à ce concept aurait beaucoup de sens. Cela contribuer­ait à augmenter le nombre de joueurs admissible­s au repêchage et de faire une meilleure lecture de leurs habiletés. Un joueur évolue beaucoup de 18 à 19 ans.»

Bill Torrey, qui agit comme consultant aux opérations hockey des Panthers, a pour sa part bâti la dynastie des Islanders de New York avec des joueurs qui jouaient dans les rangs juniors jusqu’à 20 ans.

Les Denis Potvin, Bryan Trottier, Clark Gillies, Bob Nystrom et Mike Bossy ont mis peu de temps à s’affirmer dans la LNH.

Le repêchage tel qu’on le connaît aujourd’hui a commencé en 1969. Or, Sam Pollock, le rusé directeur général du Canadien de l’époque, s’était assuré le droit de réclamer les deux meilleurs espoirs québécois au début du repêchage cette année-là. Il avait opté pour Réjean Houle et Marc Tardif, qui évoluaient avec le Canadien junior.

Ce fut la dernière fois que le Tricolore passa devant tout le monde.

L’année suivante, Gilbert Perreault était repêché au premier rang par les Sabres de Buffalo.

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PHOTO AFP Evan Barratt a été sélectionn­é au 90e rang par les Blackhawks.
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