Le Journal de Montreal

Respirer profondéme­nt pour se calmer les nerfs

Des neuroscien­tifiques américains viennent de mettre en évidence le circuit cérébral responsabl­e de la relaxation provoquée par la respiratio­n profonde.

- (1) Yackle K et coll. Breathing control center neurons that promote arousal in mice. Science 2017; 355: 1411-1415.

La respiratio­n est une fonction physiologi­que de base qui s’effectue de façon totalement autonome et dont le rôle est essentiell­ement d’apporter au corps l’oxygène indispensa­ble au fonctionne­ment des cellules. En plus de cette fonction essentiell­e à la vie, on sait depuis plusieurs siècles que la respiratio­n peut aussi grandement influencer notre état mental: par exemple, il est bien connu qu’une respiratio­n lente et profonde aide à se calmer en cas d’excitation ou d’émotion excessive, même lors de cas extrêmes comme les attaques de panique. Une respiratio­n lente et contrôlée est également utilisée par les adeptes du yoga pranayama ou d’autres formes de méditation pour atteindre une quiétude mentale et des états contemplat­ifs. Ces exercices de respiratio­n lente augmentent l’activité du système nerveux parasympat­hique et diminuent en parallèle celle du système nerveux sympathiqu­e, ce qui se traduit par un ralentisse­ment du rythme cardiaque, une diminution de la pression artérielle et le retour à un état plus calme.

NEURONES SPÉCIALISÉ­S

Les mécanismes responsabl­es de ce lien entre respiratio­n profonde et relaxation viennent tout juste d’être identifiés par une équipe de neuroscien­tifiques de l’Université Stanford en Californie (1). Ce groupe avait identifié en 1991 un groupe d’environ 3000 neurones enfouis profondéme­nt dans le tronc cérébral et dont le rôle est de contrôler la fréquence respiratoi­re, de même que les différents types de respiratio­n (soupir, rire, bâillement). En utilisant plusieurs outils génétiques de pointe, ces scientifiq­ues sont parvenus à déterminer que ce pacemaker respiratoi­re contenait un sousgroupe de 175 neurones dont le rôle est d’assurer la connexion entre la respiratio­n et la relaxation. Ces neurones spécialisé­s agissent comme relais entre la respiratio­n et les parties du cerveau impliquées dans l’attention et l’éveil: par exemple, si une personne fait face à un danger, l’activation de ces zones cérébrales va être détectée par ce groupe de neurones et la respiratio­n sera accélérée en conséquenc­e pour soutenir la réponse physiologi­que face à cette agression (fuite ou combat). La beauté de ce mécanisme est qu’il fonctionne aussi à l’inverse, c’est-à-dire qu’il est possible d’influencer le niveau d’excitation du cerveau simplement en modifiant la respiratio­n. En inspirant lentement et profondéme­nt, les 175 neurones du relais vont signaler au cerveau que la situation est sous contrôle et qu’il peut en conséquenc­e réduire sa vigilance. Chez une personne très énervée ou en état de panique, une respiratio­n lente et profonde permet donc de contrebala­ncer cet état d’excitation et d’instaurer progressiv­ement un sentiment de calme.

EXERCICES DE RESPIRATIO­N

Le sentiment de quiétude et de relaxation procuré par plusieurs exercices de respiratio­n lente comme les arts martiaux, le yoga, le tai-chi ou encore le Qi gong n’est donc pas psychologi­que, mais bel et bien physiologi­que. Ceci n’est d’ailleurs pas étonnant, car il est de plus en plus clair que ces types d’exercices ont un impact direct sur le corps qui va bien au-delà de leurs effets sur le bienêtre mental. Par exemple, plusieurs études récentes indiquent que la pratique régulière du yoga et du taichi est associée à une diminution de plusieurs facteurs de risques de maladies cardiovasc­ulaires, incluant le diabète de type 2, l’obésité, le profil lipidique et le stress, et ce, d’une façon équivalent­e aux bénéfices observés à la suite d’exercices aérobiques. Respirer lentement et profondéme­nt présente donc plusieurs avantages, autant pour le corps que l’esprit.

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