Le Journal de Montreal

Du zoo naturel à la jungle politique

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En réponse à la lettre du ministre Luc Blanchette publiée le 22 juin

Vous dites que le caribou forestier de Vald’Or représente un cas d’exception en raison de la situation précaire et de son habitat très perturbé. Pourtant, votre ministère, depuis 1984, a systématiq­uement ignoré les avis émis par les biologiste­s de votre propre gouverneme­nt, de la Fédération québécoise de la faune, du Regroupeme­nt écologiste Val-d’Or et environs (REVE) et même des résidents du lac Sabourin qui vous avaient tous alerté du danger d’ouvrir le territoire à l’exploitati­on forestière. Vous annoncez — maintenant que vous avez renoncé à déporter les caribous — que votre nouveau plan d’action repose sur une approche « visant à concentrer la majeure partie des efforts de protection sur les éléments clés de l’habitat du caribou et où les chances de succès sont les meilleures ».

Or, votre seul plan d’action perceptibl­e consiste à détruire ce qui reste. Ce territoire est déjà dévasté par les coupes de bois, quadrillé de chemins forestiers, de sentiers aménagés pour les véhicules hors route et saturé de camps de chasse. Vous avez tout permis. Y compris accorder à la forestière Eacom, en 2016, le droit de construire un nouveau chemin et, maintenant, votre gouverneme­nt s’apprête à octroyer à la minière Agnico-Eagle un permis pour implanter une mine. Un plan d’aménagemen­t de l’habitat du caribou ? « Aménager » les compagnies serait plus juste.

Vous nous promettez, d’ici la fin de l’année, un rapport plus complet qui comprendra les études et les scénarios déjà existants. D’ici la fin de l’année ? Pourquoi attendre ? Il manque quoi, des photos ?

Vous dites également que la forêt procure un environnem­ent à une faune diversifié­e. Votre ministère peut vous parler du déclin de plusieurs espèces d’oiseaux nicheurs, du caribou forestier, de la martre, du pékan, déclin causé principale­ment par la destructio­n de l’habitat et la multiplica­tion des chemins.

Comment osez-vous parler de développem­ent durable de la forêt quand vous déclarez que la seule présence d’une quinzaine de caribous menace la ville de Val-d’Or de fermeture ?

Enfin, vous prétendez dans votre missive défendre « nos » intérêts. Vous n’écoutez en fait que l’avis de vos obscurs sous-ministres qui ont juré de bloquer tout projet de conservati­on, car le « bon bois » à couper se fait maintenant rare, petit et lointain. Pas question pour eux d’épargner ce qui reste de la forêt des caribous forestiers de Val-d’Or, si près de la 117 et des scieries. Voilà l’histoire.

Pour donner une chance aux caribous, une seule avenue : fermez les chemins sur leur territoire et interdisez les engins hors route.

La politique transparen­te promise par votre gouverneme­nt l’est autant qu’une boule de bowling.

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Henri Jacob, président de l’Action boréale, et Richard Desjardins, vice-président
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