Les vétérans canadiens passent en deuxième
Des soldats blessés au combat attendent toujours de recevoir leur pension à vie
OTTAWA | D’anciens combattants du Canada digèrent mal que l’ex-enfant-soldat Omar Khadr ait reçu 10,5 millions $ si vite alors que leurs propres causes contre Ottawa traînent devant les tribunaux depuis des années.
« Chaque fois que nous, les vétérans, avons des demandes concernant nos droits fondamentaux, Ottawa répond qu’il n’y a pas d’argent », critique Jordie Yeo, ancien combattant québécois blessé en Bosnie-Herzégovine en juillet 1993.
Touché aux deux jambes par des balles ennemies lors d’une mission, le Montréalais a vu de ses compagnons d’armes tomber sous ses yeux, un événement qui a continué de le hanter à son retour au pays.
INJUSTE
Il ne se doutait alors pas que le combat continuerait au pays pour faire reconnaître son syndrome de stress post-traumatique. Six ans devant les tribunaux ont été nécessaires pour démontrer le sérieux de son état et se faire accorder une pension pour soldat blessé.
« Pourquoi le gouvernement prend-il plus en considération les droits de ceux qui se battent contre leur pays que ceux qui se battent pour leur pays ? » demande M. Yeo.
Surtout, il s’explique mal que le Canada ait versé si rapidement 10,5 M$ à Omar Khadr la semaine dernière, sous prétexte que le pays n’a pas respecté ses droits garantis par la constitution.
BATAILLE
Né à Toronto, Khadr a été capturé en Afghanistan à l’âge de 15 ans et emprisonné à la base américaine de Guantanamo pendant une décennie, faute d’avoir été rapatrié par le gou- vernement Harper.
« Pendant ce temps, les militaires qui reviennent blessés n’ont même plus droit à leur pension à vie, même si ça a été promis par Justin Trudeau. On aimerait que ça se règle plus vite que l’affaire Khadr », compare M. Yeo, qui dit mener cette lutte pour la nouvelle génération de soldats.
Six anciens combattants canadiens blessés en Afghanistan mènent depuis plus de cinq ans leur propre bataille juridique contre Ottawa pour avoir droit à une pension à vie, ce qui leur est refusé.
Ce type de pension a été aboli pour les militaires qui ont pris leur retraite après 2006, et c’est maintenant à la Cour d’appel de la Colombie-Britannique de déterminer si les militaires blessés y ont quand même droit.
« Les vétérans se sentent d’autant plus trahis depuis le cas Khadr », croit Marc Burchell, porte-parole de l’organisation Equitas Society, qui a lancé ce recours collectif.
2017
Au bureau du ministre des Anciens Combattants Kent Hehr, on promet que les militaires blessés retrouveront leur pension à vie d’ici la fin de l’année.
« Nous sommes déterminés à offrir une option de pension à vie pour nos vétérans blessés et malades, et nous allons donner plus de détails sur cela avant la fin de l’année 2017 », indique son porte-parole, en ajoutant que le gouvernement a prévu 7 milliards $ supplémentaires pour les vétérans depuis deux ans.