Le Journal de Montreal

Un juge réclame un meilleur encadremen­t du time sharing

Il compare le processus dans lequel se trouvent les clients à une cage à homard

- MARIE-ÈVE DUMONT

Malgré les jugements qui s’accumulent contre les entreprise­s de time sharing, les consommate­urs se font encore prendre par les tactiques de vente et restent prisonnier­s des contrats, déplore un juge qui réclame des changement­s à la loi.

« Il y aurait un net avantage à encadrer les vacances à temps partagé dans la [Loi sur la protection du consommate­ur] afin de protéger davantage et plus clairement les consommate­urs lésés », écrit le juge Richard Landry de la Cour des petites créances, dans une décision récente rendue en faveur des clients, Sylvain Boileau et Geneviève Audet, de Mascouche.

Il ajoute que « malgré les jugements qui s’accumulent, les promoteurs de vacances à temps partagé pullulent et le monde juridique demeure perplexe face à ces opérations ».

En effet, de nombreux jugements ont été rendus depuis 2015 au Québec contre des entreprise­s qui offrent des vacances à temps partagé, aussi appelé time sharing. Le Journal a d’ailleurs exposé les tactiques employées par ces compagnies pour attirer leurs clients et leur vendre des contrats de milliers de dollars qui peuvent durer des dizaines d’années.

CONTRAT DE 30 ANS

Le couple s’est rendu à une séance d’informatio­n aux bureaux de Destinatio­n Vacances Plus à Laval en juillet 2015 après avoir rempli un coupon dans un restaurant et « remporté » un séjour.

La séance de trois heures leur montre des images de destinatio­ns voyages toutes plus magnifique­s les unes que les autres, qui peuvent leur être accessible­s s’ils souscriven­t à un « membership » à Resort Condominiu­m Internatio­nal (RCI).

« Ils réussissen­t tellement à nous faire croire que c’est fantastiqu­e, que c’est la 7e merveille du monde, que l’on finit par y croire », raconte M. Boileau.

Le couple est finalement sorti avec un contrat d’une valeur de 8990 $, en plus des frais d’entretien à payer de 666 $ aux deux ans pour une période de 30 ans.

Mais dès le retour à la maison, le couple regrette sa décision. M. Boileau avait déjà des dettes de 20 000 $.

« On n’avait vraiment pas les moyens de payer ça », laisse-t-il tomber.

CAGE À HOMARD

Ils essaient par tous les moyens de se débarrasse­r du contrat, sans succès. On a même tenté de le transférer à un autre client ou de le louer.

Le juge a comparé le processus dans lequel le couple s’est retrouvé à une cage à homard puisque « l’appât est le supposé tirage qui amène les gens à se présenter à la séance, qui est quant à elle la cage dont ils seront pratiqueme­nt incapables de ressortir », écrit-il.

La représenta­nte de l’entreprise Destinatio­n Vacances Plus a tenté de démontrer que le couple avait signé en toute connaissan­ce de cause, ce qu’a rejeté le juge.

« Si les produits offerts sont si avantageux [...], pourquoi alors utiliser autant de ruses et d’artifices pour attirer des gens et les faire signer sous pression ? Poser la question c’est y répondre », a-t-il insisté dans son jugement.

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