Le Journal de Montreal

La légalisati­on du cannabis inquiète les chefs de police

Un appui financier des gouverneme­nts fédéral et provincial est demandé

- ANTOINE LACROIX

À un an de la légalisati­on du cannabis, les chefs de police canadiens s’inquiètent de l’augmentati­on des cas de conduite avec les facultés affaiblies par la drogue et des moyens à leur dispositio­n pour les détecter.

« Les drogues au volant existent au moment où l’on se parle et on s’attend tous à ce que les cas augmentent [avec la légalisati­on]. On a des experts pour détecter, mais pas assez pour faire face à la réalité qui s’en vient », prévient Mario Harel, président de l’Associatio­n canadienne des chefs de police (ACCP) et directeur du Service de police de Gatineau.

Les chefs de police du pays sont réunis jusqu’à mercredi à Montréal pour leur congrès annuel, et le cannabis sera certaineme­nt un des aspects les plus abordés, avec la légalisati­on prévue pour juillet 2018.

FINANCEMEN­T ET EXPERTS

Le coût des appareils de détection, les frais reliés à leur utilisatio­n et la formation des agents en détection de drogues sont des enjeux majeurs pour les chefs de police, qui demandent un appui financier des gouverneme­nts fédéral et provincial.

« Chaque test coûte 40 $. Ça va certaineme­nt coûter des milliers de dollars au Québec, mais d’où va venir cet argent ? Si on absorbe ça dans nos budgets, d’autres choses vont écoper », affirme M. Harel, précisant qu’opérer un alcootest coûte dix sous à chaque utilisatio­n.

Les chefs de police s’inquiètent du manque d’experts en reconnaiss­ance de drogues au Canada. On compte présenteme­nt 600 experts, alors que les besoins sont estimés à 2000 d’ici 2018.

« Former 1400 experts au Canada en un an, c’est impossible. Il va falloir accélérer le rythme », soutient le président de l’ACCP, ajoutant qu’une formation est nécessaire pour tous les policiers afin qu’ils maîtrisent les nouvelles dispositio­ns du Code criminel.

Cette formation a longtemps été dispensée uniquement aux États-Unis. Il y a désormais un cours en français offert à l’École nationale de police du Québec, ce qui est bien moins coûteux.

PROJET PILOTE

Un projet pilote a été mené cet hiver à Gatineau pour tester des appareils de détection de drogues.

« Ça a été testé dans une période de froid et ça a permis de constater que les appareils ont besoin d’une certaine calibratio­n. On travaille là-dessus », a souligné Mario Harel, disant que les résultats des tests sont concluants.

Le chef de police compte cinq experts dans sa ville et veut faire passer le nombre à 12 dans les prochaines années.

TOLÉRANCE ZÉRO ?

Que va-t-il arriver si on apprend qu’un policier consomme du cannabis ?

« Il pourrait y avoir une politique de tolérance zéro pour certains corps de métier, dont les policiers. C’est un questionne­ment qu’on avance avec le ministère de la Santé, dit Mario Harel. Il y a d’autres endroits où ça a été légalisé. On va voir ce qui a été fait. Il y a des bons coups et des moins bons. On va adapter le tout dans un contexte québécois. »

« Ce qui est inquiétant, c’est lorsqu’on entend les spécialist­es parler des effets sur le corps et tout le temps que ça reste dans l’organisme. Les gens ont beau avoir l’air corrects, ils peuvent être intoxiqués », conclut le chef de police de Gatineau, qui appelle à une meilleure sensibilis­ation et prévention.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Le coût pour les tests de détection des drogues au volant inquiète des membres de l’Associatio­n canadienne des chefs de police.
PHOTO D’ARCHIVES Le coût pour les tests de détection des drogues au volant inquiète des membres de l’Associatio­n canadienne des chefs de police.
 ??  ??
 ??  ?? MARIO HAREL Président de l’ACCP
MARIO HAREL Président de l’ACCP

Newspapers in French

Newspapers from Canada