Les épreuves en eau libre longue distance
À la fin du mois aura lieu la renommée Traversée du lac Saint-Jean, le rendez-vous historique de 32 kilomètres vers lequel convergent les meilleurs nageurs au monde. Rencontre avec Xavier Desharnais, qui a remporté à deux reprises les grands honneurs de la Traversée, pour s’entretenir sur la nage en eau libre longue distance.
On est mardi. Aujourd’hui, Xavier a deux entraînements de deux heures en piscine. On se rencontre juste avant sa sieste récupératrice. L’étudiant à la maîtrise en kinésiologie de l’Université de Montréal a une petite semaine… lors de laquelle il nagera plus d’une vingtaine d’heures.
« Plus jeune, je nageais entre 90 et 100 kilomètres par semaine », me dit Xavier. Il a 27 ans.
« Je ne suis pas vieux, mais je remarque l’effet du temps », précise-t-il. Xavier Desharnais s’entraîne au club CAMO à Montréal avec Philippe Guertin, 26 ans, spécialiste du 10 km.
Xavier a mis de côté le 10 km, et ses espoirs olympiques. « Ma place est dans les très longues distances. Plus la distance est longue, et plus les conditions sont difficiles, mieux je performe », résume le nageur originaire de Sherbrooke.
Il résiste où les autres cèdent. Xavier est déterminé à devenir le meilleur nageur de longue distance du monde.
UN SPORT EN ÉVOLUTION
La nouvelle réglementation concernant le port de combinaison isothermique ne lui simplifiera pas la donne.
Rappelons que la nage en eau libre se pratiquait jusqu’à maintenant en simple maillot de bain, laissant l’homme dans son plus simple appareil — ou presque — vaincre les éléments tout au long de sa traversée. Dans les années de Régent Lacoursière, il n’était pas rare que même les requins fassent partie de l’équation. C’était l’homme contre l’eau. C’était l’aventure.
Or, pour une première année, la Fédération internationale de natation (FINA) oblige le port d’une combinaison lorsque la température chute sous 18o C, et la rend facultative entre 18 et 20o C. Comme la Traversée fait partie du circuit Coupe du monde Grand Prix FINA, elle doit impérativement se conformer à la nouvelle réglementation, ce qui ne fait pas des heureux parmi les Québécois, habitués de composer avec l’eau froide.
« Aucun nageur en eau libre ici n’est favorable à cette réglementation, déplore Xavier Desharnais. Les motivations de nous protéger sont louables, mais aucun incident n’a été répertorié à ces températures et il y a des risques de blessures réels aux épaules à nager avec une combinaison. »
L’essence du sport se perd, selon le nageur. Au même titre que les vagues ou les courants, la température de l’eau fait partie de l’adversité contre laquelle tout bon nageur doit s’entraîner. C’est à coup de douches glacées que l’athlète s’est jadis entraîné à bien performer dans ces conditions.
Refuser de la porter alors qu’elle est facultative n’est pas une option envisageable non plus, la combinaison isothermique offrant un avantage indéniable aux nageurs qui la choisissent. « C’est simple : on flotte, sans travailler! » résume Xavier Desharnais.
Le nageur est habitué à trimer; cette nouvelle « béquille » encombrante pour un athlète se démarquant dans des conditions hostiles ne lui convient pas.
MOINS DE TRAVERSÉES
Autre ombre au tableau : les longues distances dans lesquelles Xavier Desharnais se spécialise sont aussi moins populaires.
« L’arrivée du 10 km aux Olympiques est une bénédiction pour l’eau libre, mais pas pour ses longues distances », résume le nageur.
Le nombre d’événements de longue distance ne cesse de diminuer, et on n’a pas besoin de regarder bien loin pour le remarquer avec la perte récente de la Traversée du lac Memphrémagog.
Le circuit Coupe du monde Grand Prix FINA compte aujourd’hui à peine quatre épreuves cette année (dont la Traversée du lac Saint-Jean), soit deux fois moins qu’au cours de ses meilleures années.
En ce moment même, il n’y a aucun représentant canadien au 25 km du Championnat du monde de la FINA à Budapest, malgré que Philippe Guertin s’y soit qualifié (il a participé au 10 km, finissant en 28e position mardi). Tous les efforts sont concentrés sur le 10 km.
XAVIER DESHARNAIS NAGE À CONTRE-COURANT
Le 29 juillet, il tentera à nouveau d’atteindre une marche du podium de la réputée Traversée du lac Sain-tJean, une étape critique sur le circuit avant le marathon du lac d’Ohrid en Macédoine en août et la traversée du golfe entre Capri et Naples en septembre. C’est sa compétition pour briller.
Bonne chance!