Formule « E » comme dans « Exaspération »
Avec sa Formule E, le maire de Montréal, Denis Coderre, prend un quartier entier en otage. Plantée en plein été sur une artère majeure du centre-ville, cette « course urbaine » de voitures 100 % électriques enclave plus de mille résidents et prive des commerçants de milliers de dollars en revenus.
Il faut franchement le voir pour le croire. Pour se déplacer, c’est la croix et la bannière. Plusieurs circuits d’autobus sont détournés et le bruit de la course s’annonce corsé. Le tout préparé sans respect réel pour les citoyens affectés.
Impossible d’imaginer un pareil branle-bas de combat imposé aux élites outremontaises. Mais dans le CentreSud, nettement moins nanti, la ville se le permet sans broncher.
Dans une ville déjà truffée de nidsde-poule, de bouchons de circulation, de chantiers et de cônes orange qui se reproduisent tous à la vitesse d’un troupeau de lapins en chaleur, c’est la goutte qui fait déborder le vase. À 24 millions de dollars ou plus en fonds publics pour une course qui aurait dû être tenue au circuit Gilles-Villeneuve, la facture salée est dure à avaler.
DOLÉANCES NOMBREUSES
Évaluée par Radio-Canada à plus de 1 milliard $, l’orgie douteuse de dépenses publiques pour le 375e de Montréal sera payée en majeure partie par les contribuables. Près de 80 % des dépenses étant couvertes par la Ville de Montréal de même que par les gouvernements Couillard et Trudeau.
De retour de vacances, Denis Coderre est sorti hier pour « remettre les pendules à l’heure ». La Formule E, jure-t-il, sera « magique ». « On se lance dans l’électrification ! », lance-t-il tout joyeux, dont Montréal pourrait devenir une « vitrine technologique » internationale.
Quant aux doléances nombreuses des résidents et des commerçants, le maire les banalise. Osant une analogie qui frôle le ridicule, si la Ville avait écouté les critiques à l’époque, dit-il sans rire, l’« Expo 67 n’aurait jamais eu lieu ».
Pardon ? On parle ici d’une course de voitures, pas d’une exposition universelle. Le reste, selon lui, ne serait que de la basse « récupération politique » par ses adversaires.
« LIGNES DE PRESSE »
Le problème est que les « lignes de presse » du maire ne répondent pas aux vraies questions. Personne ne s’oppose à l’électrification des transports. Le problème est dans la décision unilatérale et insensée de la Ville de planter la Formule E en plein milieu d’un quartier habité. Il est dans le coût exagéré de l’événement alors qu’à l’étranger, les grandes villes qui ont leur Formule E n’enclavent aucune population locale et n’y investiraient pas ou peu de fonds publics.
Que la Formule E soit « magique » ou non ne changera rien à cette recette indigeste d’une course prévue aussi pour les deux prochaines années. Au secours !
Sûr de sa réélection cet automne, le maire Coderre n’en perd évidemment pas le sommeil. Dommage que les Montréalais qui endurent ce capharnaüm à vroum vroum ne puissent pas en dire autant.