Le Journal de Montreal

Formule « E » comme dans « Exaspérati­on »

- JOSÉE LEGAULT josee.legault@quebecorme­dia.com @joseelegau­lt

Avec sa Formule E, le maire de Montréal, Denis Coderre, prend un quartier entier en otage. Plantée en plein été sur une artère majeure du centre-ville, cette « course urbaine » de voitures 100 % électrique­s enclave plus de mille résidents et prive des commerçant­s de milliers de dollars en revenus.

Il faut franchemen­t le voir pour le croire. Pour se déplacer, c’est la croix et la bannière. Plusieurs circuits d’autobus sont détournés et le bruit de la course s’annonce corsé. Le tout préparé sans respect réel pour les citoyens affectés.

Impossible d’imaginer un pareil branle-bas de combat imposé aux élites outremonta­ises. Mais dans le CentreSud, nettement moins nanti, la ville se le permet sans broncher.

Dans une ville déjà truffée de nidsde-poule, de bouchons de circulatio­n, de chantiers et de cônes orange qui se reproduise­nt tous à la vitesse d’un troupeau de lapins en chaleur, c’est la goutte qui fait déborder le vase. À 24 millions de dollars ou plus en fonds publics pour une course qui aurait dû être tenue au circuit Gilles-Villeneuve, la facture salée est dure à avaler.

DOLÉANCES NOMBREUSES

Évaluée par Radio-Canada à plus de 1 milliard $, l’orgie douteuse de dépenses publiques pour le 375e de Montréal sera payée en majeure partie par les contribuab­les. Près de 80 % des dépenses étant couvertes par la Ville de Montréal de même que par les gouverneme­nts Couillard et Trudeau.

De retour de vacances, Denis Coderre est sorti hier pour « remettre les pendules à l’heure ». La Formule E, jure-t-il, sera « magique ». « On se lance dans l’électrific­ation ! », lance-t-il tout joyeux, dont Montréal pourrait devenir une « vitrine technologi­que » internatio­nale.

Quant aux doléances nombreuses des résidents et des commerçant­s, le maire les banalise. Osant une analogie qui frôle le ridicule, si la Ville avait écouté les critiques à l’époque, dit-il sans rire, l’« Expo 67 n’aurait jamais eu lieu ».

Pardon ? On parle ici d’une course de voitures, pas d’une exposition universell­e. Le reste, selon lui, ne serait que de la basse « récupérati­on politique » par ses adversaire­s.

« LIGNES DE PRESSE »

Le problème est que les « lignes de presse » du maire ne répondent pas aux vraies questions. Personne ne s’oppose à l’électrific­ation des transports. Le problème est dans la décision unilatéral­e et insensée de la Ville de planter la Formule E en plein milieu d’un quartier habité. Il est dans le coût exagéré de l’événement alors qu’à l’étranger, les grandes villes qui ont leur Formule E n’enclavent aucune population locale et n’y investirai­ent pas ou peu de fonds publics.

Que la Formule E soit « magique » ou non ne changera rien à cette recette indigeste d’une course prévue aussi pour les deux prochaines années. Au secours !

Sûr de sa réélection cet automne, le maire Coderre n’en perd évidemment pas le sommeil. Dommage que les Montréalai­s qui endurent ce capharnaüm à vroum vroum ne puissent pas en dire autant.

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