Le Journal de Montreal

On a la tête dure à Radio-Canada

- GUY FOURNIER guy.fournier @quebecorme­dia.com

Mon vieux collègue Marc Pichette, « premier directeur Relations publiques, Promotion et Partenaria­ts » de Radio-Canada (eh ! oui, c’est son titre, majuscules comprises), est très malheureux de ma chronique de mardi. Il m’envoie même, avec copies à « tout ce qui bouge » à la direction de CBC/Radio-Canada et de nos deux journaux quotidiens, une lettre indignée.

Loin d’infirmer mes propos, sa lettre confirme exactement ce que je dis depuis longtemps, c’est-à-dire qu’il y a confusion totale sur le mandat de notre diffuseur public et, surtout, que Radio-Canada copie servilemen­t les pratiques des diffuseurs privés. « Tant à Radio-Canada que chez les diffuseurs privés, écrit Pichette, on peut voir des séries dramatique­s originales canadienne­s financées avec des fonds publics offertes en vidéo sur demande ou diffusées sur des chaînes spécialisé­es avant d’être inscrites à la grille des télés généralist­es. »

C’est exact que les diffuseurs privés, par le biais des producteur­s indépendan­ts, bénéficien­t de fonds publics qui leur viennent des divers fonds d’aide et des crédits d’impôt. Tout comme Radio-Canada en profite aussi. Mais Pichette oublie que la somme de plus d’un milliard de dollars qui provient annuelleme­nt de nos taxes et impôts impose à CBC/Radio-Canada un comporteme­nt qui doit être différent de celui des privés. Sinon, à quoi bon !

La direction de Radio-Canada peut-elle regarder les Canadiens dans le blanc des yeux et répondre franchemen­t qu’elle remplit les huit obligation­s que lui impose la loi actuelle de la radiodiffu­sion ?

DU FRONT TOUT LE TOUR DE LA TÊTE

Il est inadmissib­le, par exemple, que Radio-Canada prive momentaném­ent une partie importante de son auditoire francophon­e d’une grande série comme Anne en la diffusant d’abord sur ARTV, une chaîne spécialisé­e pour laquelle il faut payer. Les anglophone­s, eux, l’ont vue gratuiteme­nt et peuvent encore la voir pour rien sur cbc.ca.

Pichette a le front d’ajouter : « Anne, inspirée d’une oeuvre littéraire… colle parfaiteme­nt au mandat d’ICI ARTV ». Devons-nous en conclure qu’aux heures de grande écoute, la chaîne principale est plutôt réservée aux émissions de verbiage et de « plugs » comme Les échangiste­s ?

C’est triste, mais règle générale, le réseau anglais respecte mieux son mandat. Ce n’est pas parce que la direction du réseau français se pète les bretelles face aux cotes d’écoute souvent anémiques de son vis-à-vis qu’elle remplit mieux son mandat de diffuseur public.

La direction de Radio-Canada peut-elle regarder les Canadiens dans le blanc des yeux et répondre franchemen­t qu’elle remplit les huit obligation­s que lui impose la loi actuelle de la radiodiffu­sion ? J’invite mes lecteurs à lire le mandat de notre société d’État, ne fût-ce que pour constater qu’ils sont loin d’avoir tort de se plaindre de sa programmat­ion télévisée. Des plaintes dont ils me font part de vive voix ou par courriel presque chaque jour.

PAUVRES MINORITÉS

Les Anglos comme les francophon­es du Québec qui ne peuvent recevoir le signal de la CBC par ondes hertzienne­s, donc gratuiteme­nt, comme les francophon­es hors Québec qui ne peuvent syntoniser le réseau français, liront avec intérêt que, selon la loi, la programmat­ion « doit leur être offerte en français et en anglais de manière à refléter la situation et les besoins particulie­rs des deux collectivi­tés de langue officielle, y compris ceux des minorités de l’une ou l’autre langue ».

C’est vrai que la loi sur la radiodiffu­sion date de 1991, mais je doute qu’elle soit refondue pour rendre moins contraigna­nt le mandat de CBC/Radio-Canada. Ce n’est pas le mandat qui fait défaut, mais l’interpréta­tion qu’en fait une direction complaisan­te et imperméabl­e à toute critique. Quoiqu’en pense Marc Pichette…

TÉLÉPENSÉE DU JOUR

C’est vrai que j’ai deux VUS, mais j’ai une brosse à dents et un rasoir électrique­s. – Le maire Denis Coderre.

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