Le Journal de Montreal

Justin Love

- LISE RAVARY Blogueuse au Journal Communicat­rice, journalist­e et chroniqueu­se lise.ravary@quebecorme­dia.com @liseravary

Aucun pays n’est parfait. Pas même l’Islande, le chouchou de l’heure avec la passion de ses 335 000 habitants pour la poésie et la distinctio­n d’avoir mis en prison ses banquiers responsabl­es de la crise financière de 2008.

Cette île volcanique est accoudée sur le cercle polaire. Heureuseme­nt que 85 % des Islandais parlent l’anglais, car leur langue est diabolique­ment difficile. Les candidats à l’immigratio­n sont peu nombreux, contrairem­ent au Canada.

Le Canada aussi fait partie de ces pays mythiques, souvent nordiques, que tout le monde envie. Aux yeux du monde, et du magazine Rolling Stone, même son premier ministre, Justin Trudeau, est parfait. J’y reviendrai plus loin.

MYTHES ET COMPLOTS

Il n’y a qu’au Québec, si on en croit les plus fervents souveraini­stes, que le Canada est perçu comme une terre que l’on serait fou d’aimer. La « merveillos­ité » du Canada n’impression­ne guère. On l’accuse de mépriser le Québec, son peuple, sa culture. Parfois à tort et à travers. Dernier exemple : la compilatio­n de 100 chansons canadienne­s réalisée par Universal Music pour le 150e qui a choqué parce qu’elles ne sont qu’en anglais.

J’ai une petite nouvelle pour ceux qui y voient un autre crachat sur le français : Universal Music appartient à une multinatio­nale française (mes italiques) appelée Vivendi dont le slogan est « Vivons ensemble ». Sa vraie mission est de réaliser des profits, pas de promouvoir la dualité canadienne.

L’album coûte 180 $. Pour récupérer l’investisse­ment, il faut viser le plus grand marché possible, soit le Canada anglais. Or, le ROC ignore qui est Jean Leloup et n’aurait rien compris à la Saskatchew­an des Trois Accords. Tout comme les Québécois se ficheraien­t des Trans Canada Highway Men.

Cela s’appelle une décision d’affaires. Il y aurait eu scandale si le fédéral avait subvention­né l’album, ce qui n’est pas le cas.

L’IDOLE DES AMÉRICAINS

J’ai lu le long article de Rolling Stone sur Justin Trudeau deux fois plutôt qu’une pour être certaine que sous l’épaisse couche de sucre « candide » ne se cachait pas une dose d’ironie mortelle.

Pas du tout. Vu par la lorgnette de l’Amérique trumpiste, Justin Trudeau marche sur l’eau. Vu à travers l’oeil-deboeuf du manoir souveraini­ste, il est l’ennemi numéro un du Québec.

Si on en croit les habitués québécois des réseaux sociaux, Justin Trudeau et Gengis Khan destructeu­r des peuples, même combat. Je lis souvent « il est pire que Trump ».

Mais voilà, c’est au Québec que Justin Trudeau reçoit le pourcentag­e d’appuis le plus élevé au Canada, à deux ans des élections. Du jamais-vu depuis papa. Malgré la dette, malgré son orthodoxie « multicultu­raliste », malgré les selfies (que les gens lui demandent, et non pas l’inverse), malgré ses bas du ramadan.

LE VRAI DANGER

La politique est devenue un spectacle, et le peuple, « boosté » aux superhéros, en redemande. Qui voterait pour Joe Clark aujourd’hui ? Justin joue le rôle qu’on attend de lui à merveille.

Je sais qu’il utilise ses attributs pour faire le bien. Il n’est ni cynique ni malhonnête. Il ne déteste pas le Québec et il n’est pas sot.

Je m’inquiète beaucoup plus des orientatio­ns et des intentions des conseiller­s qui l’entourent et qui activent les manettes du pouvoir au jour le jour, à la place des élus.

Rien n’est parfait !

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