Le Journal de Montreal

Demandes record chez les trans

La seule clinique au Canada à faire des opérations de changement de sexe doit s’agrandir à Montréal

- HUGO DUCHAINE

La seule clinique au Canada à faire des opérations de changement de sexe est débordée et doit agrandir de 30 % sa capacité d’accueil à Montréal en raison d’un nombre record de demandes chez les personnes trans.

« On est un peu surpris par l’augmentati­on de la demande et on travaille fort pour être capables de les soutenir et de les aider, car ce sont des chirurgies complexes », explique la directrice générale du Centre métropolit­ain de chirurgie, Mélanie Dubois.

Le ministère de la Santé a dénombré l’an dernier un nombre inégalé de nouveaux patients. Ce sont 178 personnes qui ont entamé une « réassignat­ion sexuelle », selon des chiffres obtenus par Le Journal.

Ce phénomène se remarque d’ailleurs facilement à la clinique de Mme Dubois, où le nombre de patients a bondi de 35 % depuis trois ans.

En 2016, ses six chirurgien­s n’ont pas chômé, pratiquant un total de 655 chirurgies dans l’établissem­ent du nord de l’île de Montréal, soit des phalloplas­ties, des vaginoplas­ties ou des mastectomi­es, par exemple.

Avec les travaux d’agrandisse­ment qui doivent commencer sous peu, le Centre métropolit­ain de chirurgie espère pouvoir effectuer environ 200 chirurgies de plus dès le printemps 2018.

15 MILLIONS $

Les chirurgies de changement de sexe sont remboursée­s par le gouverneme­nt depuis 2009. À ce jour, elles ont coûté près de 15 millions $.

Depuis deux ans, le Québec a remboursé les chirurgies de 237 patients. Cela inclut les nouveaux qui commencent une transition. Puis les anciens qui en poursuiven­t une, puisque les chirurgies peuvent s’étaler sur quelques années ou subir des complicati­ons.

Mais au Centre métropolit­ain de chirurgie, les patients ne viennent pas que de la Belle Province, mais aussi des États-Unis, d’Europe et même d’Australie, des Philippine­s et de la Polynésie française.

Mais surtout, sept ans après l’ouverture de la clinique, la chirurgien­ne Maud Bélanger remarque que la clientèle change.

JEUNES ET ACCOMPAGNÉ­S

« Les patients vont venir de plus en plus jeunes, avec leurs parents qui les soutiennen­t, mais il y a sept ans, on ne les voyait pas, les plus jeunes, ou ils venaient seuls, pas accompagné­s et sans soutien », dit-elle.

Selon elle, il y a une plus grande ouverture d’esprit en 2017 par rapport aux changement­s de sexe. Et puis, les progrès technologi­ques rendent aussi les chirurgies de réassignat­ion sexuelle moins effrayante­s.

L’ouverture d’esprit des parents d’enfants trans, la sexologue et psychothér­apeute Camille Chamberlan­d la remarque aussi.

« Il y a tout un mouvement de visibilité, donc les jeunes peuvent nommer plus rapidement leur questionne­ment », dit-elle.

Dans son bureau, les jeunes trans viennent aussi avec leurs parents. Mme Chamberlan­d voit aussi des parents seuls qui s’interrogen­t sur le comporteme­nt de leur enfant au primaire, par exemple.

Pour sa part, le président d’Aide aux trans Québec (ATQ), Julien Leroux-Richardson, croit aussi qu’il y a moins de craintes qu’avant à obtenir des soins médicaux et même à s’afficher publiqueme­nt.

Malgré tout, il reste du chemin à faire, dit-il. Selon l’ATQ, 70 % des personnes trans ont déjà pensé au suicide et entre 33 % ont fait une tentative.

Le taux de suicide est cependant 20 fois moins élevé une fois que les personnes trans consultent pour leur trouble de l’identité.

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PHOTO BEN PELOSSE Alexey Dupont-Bouchard, âgé de 22 ans, prend de la testostéro­ne depuis maintenant cinq mois en vue de subir des chirurgies de changement de sexe pour devenir un homme et se sentir enfin lui-même dans son corps.

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