Le Journal de Montreal

Un couple s’attend même dans la mort

Deux octogénair­es montréalai­s, mariés depuis 59 ans, se sont éteints à quelques heures d’intervalle

- HUGO DUCHAINE hugo.duchaine@quebecorme­dia.com

« Tu peux aller le rejoindre », a soufflé François Canty à sa mère de 86 ans, qui s’est accrochée à la vie pendant 10 jours, incapable de boire ou de manger, pour s’éteindre seulement quelques heures après son mari des 59 dernières années.

« Maman s’occupait beaucoup de lui et elle a essayé de le faire jusqu’à la fin [...] Comme si elle l’avait attendu », confie le Montréalai­s de 58 ans, qui a perdu ses parents en moins de 24 heures la semaine dernière.

Oscar et Rita Canty, âgés de 85 et 86 ans, souffraien­t tous deux de la maladie d’Alzheimer depuis deux ans. Mais dans la maladie comme dans la mort, ils n’ont pas été séparés très longtemps.

Moins de deux semaines après que sa mère eut dû déménager dans un CHSLD de Lachine à cause de sa maladie, son mari est allé la rejoindre dans le même établissem­ent.

Alors qu’ils oubliaient tout autour d’eux, il suffisait que Rita Canty voie son mari pour qu’elle le prenne par la main et qu’il lui sourie à son tour.

« Ils se reconnaiss­aient toujours, c’était vraiment spécial », se rappelle leur fils.

HOSPITALIS­ÉE D’URGENCE

Si l’état de son père se dégradait rapidement depuis quatre mois, M. Canty a été surpris quand sa mère a été hospitalis­ée d’urgence. Tous les jours, les médecins prédisaien­t la mort de l’octogénair­e, qui n’arrivait plus à boire ou manger.

« Elle nous serrait la main, c’est tout ce qu’elle pouvait faire », raconte-t-il avec émotion.

Puis un revirement triste et inattendu s’est produit, poursuit François Canty, quand son père a subitement rendu l’âme.

« Tu n’as plus à t’accrocher, papa est parti et on va être corrects », a-t-il alors soufflé, en pleine nuit, à l’oreille de sa mère qui était clouée à son lit d’hôpital depuis 10 jours.

À peine quelques heures plus tard, l’octogénair­e rendait son dernier souffle, au même étage de l’Hôpital Saint-Joseph de Lachine où elle avait travaillé plus de 40 ans.

« C’est une belle histoire », reconnaît François Canty, qui ne s’explique pas comment sa mère a survécu si longtemps dans un état aussi critique.

INFIRMIÈRE DÉVOUÉE

N’empêche, il ne s’étonne pas que sa mère ait pu vouloir attendre son père ainsi. Infirmière dévouée, elle a travaillé de nuit toute sa carrière afin de pouvoir s’occuper de la maison dans la journée.

« Elle était toujours la rassembleu­se de la famille », souligne son fils unique, qui allait souper tous les dimanches chez ses parents avec son épouse Deborah Rigg et leurs deux filles, Stéphanie et Jennifer.

Oscar et Rita Canty, qui s’étaient rencontrés grâce à des amis communs, ont vécu toute leur vie à Lachine. Le garage où travaillai­t Oscar Canty a changé de nom trois fois, mais il restait toujours derrière le comptoir des pièces.

« C’étaient des gens simples et rassembleu­rs qui ont travaillé fort toute leur vie. Des exemples à suivre », dit leur fils avec fierté.

 ?? PHOTO HUGO DUCHAINE ?? Francois Canty, son épouse Deborah Rigg et leur fille Stéphanie tiennent fièrement un portrait de Rita et Oscar Canty. Les deux octogénair­es de Lachine, mariés et inséparabl­es depuis 59 ans, sont morts à un jour d’intervalle la semaine dernière.
PHOTO HUGO DUCHAINE Francois Canty, son épouse Deborah Rigg et leur fille Stéphanie tiennent fièrement un portrait de Rita et Oscar Canty. Les deux octogénair­es de Lachine, mariés et inséparabl­es depuis 59 ans, sont morts à un jour d’intervalle la semaine dernière.

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