La capitulation de Montréal ( 1760 )
Avec la capitulation de Montréal, c’est la plus grande ville française d’Amérique qui passe dans le giron d’une autre culture, la culture anglaise. Celle-ci, pour essayer de s’imposer, se fera outrancièrement conquérante et contrôlante… mais pas sur le coup. Lévis a brûlé les drapeaux de son roi pour leur éviter l’indignité de tomber entre les mains anglaises mais, pendant quelques années, c’est l’interrègne… et Montréal est à ce moment-là, on peut le dire, une ville « bilingue ».
Le 8 septembre 1760, quand le gouverneur Vaudreuil signe avec le général Amherst (qui campe à Lachine) un acte de capitulation qui ne reconnaît même pas les honneurs de la guerre aux 3500 soldats de François Gaston de Lévis, personne ne peut prévoir quel sera le sort de Montréal. Quelque 18 000 soldats britanniques, alors en écrasante majorité, se dirigeaient vers la ville… qu’ils ne détruiraient pas. On assiste alors à une vraie cohabitation, froide mais sans violence, entre le conquérant anglais et le vaincu français, qui attendent de savoir ce que leurs rois, en Europe, vont décider. Avant la capitulation de Montréal, les troupes anglaises s’étaient montrées cruelles, brûlant tout sur leur passage, mais il n’est plus question maintenant de se montrer aussi violent avec un pays qui est devenu l’enjeu de négociations. Bref, Amherst, une fois les troupes françaises parties, joue aux gouvernants magnanimes… en attendant de voir ce qui va se décider.
La capitulation de Montréal a donc valu à la ville d’être épargnée. Le traité lui-même était rédigé en français, langue qu’Amherst utilisa aussi en échangeant avec les conquis jusqu’au traité de Paris de 1763. Alors pourquoi reste-t-il si peu de vestiges de l’époque de la Nouvelle-France à Montréal ? Ce n’est pas la guerre de Sept Ans qui a détruit la ville. Ni les années de l’administration Amherst. C’est l’obsession anglaise de dominer la métropole au XIXe siècle et de construire à la britannique partout à Montréal, qui fourmille d’édifices victoriens, afin d’effacer ce qui y restait de France.
MYTHE DU MONTRÉAL BILINGUE
Bref, la capitulation de Montréal fait naître un mythe, totalement faux et invraisemblable, que d’aucuns vont néanmoins cultiver par la suite avec obstination pour essayer d’endormir les Français : le mythe du Montréal bilingue.
En réalité, une langue croît toujours aux dépens de l’autre. Après avoir fait les beaux yeux aux conquis pour éviter qu’ils ne basculent du côté des Américains, le pouvoir britannique va montrer son vrai visage. Bientôt, une immigration massive en provenance de Grande-Bretagne, souvent irlandaise ou écossaise, va s’installer à Montréal et va se faire une gloire de ne pas parler le français.
Dans l’ouest de Montréal, des gens qui ne maîtrisent que l’anglais nous chantent les vertus du bilinguisme. Récemment, le gouvernement libéral provincial allait jusqu’à préconiser une sixième année bilingue… mais juste pour les francophones ! Quant à certains des pitres qui organisent officiellement le 375e anniversaire de Montréal à coups de millions, ils sont fiers de cette capitulation linguistique dont le franglais est le symptôme… et qui se soldera par notre disparition. Comme Pierre Bourgault aimait à le dire : le bilinguisme, c’est faire croire au lapin qu’il est l’égal du lion dans la même cage.