Le Journal de Montreal

Apprendre la survie

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Partout, la nature nous entoure, densément ou timidement. Apprendre des techniques de survie, c’est bien plus qu’apprendre à survivre. C’est apprendre à vivre avec elle. Rencontre avec Mathieu Hébert, adepte et fondateur de l’école de survie Les Primitifs.

On se donne rendez-vous au mont Royal, une fois que Mathieu m’ait rassurée qu’on ne manquera pas de matériel à discussion malgré l’environnem­ent mi-urbain. La nature est intéressan­te partout, insiste-t-il.

On n’est pas arrivé au sentier que comme de raison, Mathieu pointe quelques plantes qu’on pourrait se mettre sous les dents sans craindre un mal d’estomac.

«Tu sais que tu peux manger un pissenlit ? » explique-t-il avant de préciser que ce sont les feuilles et les racines qui sont comestible­s.

«Ça n’existe pas, de la mauvaise herbe, ajoute Mathieu. On est tout le temps en train de marcher sur de la salade.»

LA NATURE À NOS PORTES

«Les gens qui vivent en ville ne connaissen­t pas moins bien la nature que ceux qui côtoient un environnem­ent plus naturel », énonce Mathieu.

«Mais les gens qui habitent en ville savent qu’ils n’y connaissen­t pas grandchose», souligne-t-il.

Ce n’est pas parce que l’on campe quelques fois par année et qu’on apprécie les activités de plein air qu’on maîtrise bien la nature qui nous entoure. Le regard est différent. «En survie, contrairem­ent au plein air, il n’y a pas de destinatio­n», dit Mathieu.

Même si les autocars touristiqu­es du mont Royal étaient toujours visibles et que les odeurs des BBQ de vacanciers bien perceptibl­es, on n’aura en effet pas bougé de plus d’une centaine de mètres de l’après-midi, tout étant sujet à découverte­s.

Mathieu porte mon attention sur une entaille dans un arbre, m’apprenant que ces petits trous sont des marques de dents d’écureuils avides d’eau d’érable printanièr­e, puis à de minces lignées à même la mousse, qui sont des pistes de limaces gourmandes. Il ne me serait pas venu à l’idée qu’on puisse manger l’un ou l’autre sans danger.

«En survie, je privilégie les sources de nourriture végétale d’abord», clarifie tout de même Mathieu, avant de hausser les épaules en disant qu’il mangerait des fourmis sans problème, mais qu’elles sont un peu chiches en calories.

Une chenille dodue et poilue capte notre attention. «Ah non ! Les chenilles, c’est souvent poison», précise-t-il.

Comme les autres instructeu­rs de sa « tribu », Mathieu a suivi des dizaines de formations pour peaufiner son art, fondé sur une passion pour l’essentiel.

LA LIBERTÉ D’ABORD

«La liberté, c’est d’avoir besoin du moins de choses possible », pense Mathieu. Lui n’a besoin de rien pour survivre en forêt.

Mathieu assemble branche par branche un abri de débris qui nous gardera au chaud. Au Québec, le nerf de la guerre, c’est de combattre le froid et l’humidité.

«En bas de 12o C, l’hypothermi­e est un danger», dit-il. L’abri est d’ailleurs la première chose à faire lorsqu’on est perdu en forêt ou qu’on souhaite y passer quelques nuits en toute connaissan­ce de cause. Le choix des vêtements est aussi critique, selon Mathieu. C’est notre premier abri contre les éléments.»

Autres priorités en survie : l’eau, bien entendu, et conséquemm­ent le feu, qui nous permettra de la bouillir pour la purifier, en plus de nous garder au chaud.

Mathieu nous enseigne quelques techniques pour faire un feu avec des bâtons. Mes réflexes auraient été plutôt de chercher des roches.

«On n’a pas les roches pour ça ici. Tu es mieux de privilégie­r des techniques par friction avec le bois, idéalement des branches de conifères», dit Mathieu.

Il y a mille et une choses à savoir. Surtout, il y a mille et une choses à pratiquer. «Plusieurs personnes ont le savoir, par le visionneme­nt des émissions de survie par exemple, mais rares sont celles qui ont le savoir-faire pour les appliquer», précise Mathieu. Il faut se mettre les mains à la pâte – ou plutôt les mains dans la terre, et quelques feuilles sous les dents – pour apprendre ce que ceux avant nous ont toujours su.

 ?? PHOTO MARTIN ALARIE ?? Depuis une dizaine d’années, Mathieu Hébert suit des formations de survie variées. Le passionné aime partager son savoir en initiant petits et grands dans son école de survie les Primitifs.
PHOTO MARTIN ALARIE Depuis une dizaine d’années, Mathieu Hébert suit des formations de survie variées. Le passionné aime partager son savoir en initiant petits et grands dans son école de survie les Primitifs.

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