Rockstar de la piste
LONDRES | (AFP) Une légende de la piste avec l’aura d’une rockstar : Usain Bolt restera dans les annales comme un champion hors norme ayant révolutionné le sprint et l’athlétisme, aussi bien par ses immenses exploits que par une « cool attitude » devenue son image de marque. Applaudi, chéri, adulé par le public de Londres, bien plus que le champion du monde du soir aux Mondiaux 2017, le mal-aimé Justin Gatlin : la dernière représentation du roi Bolt sur 100 m aura certes un arrièregoût amer pour l’octuple champion olympique, mais elle aura une nouvelle fois témoigné de sa place dans l’histoire. Indélébile, sans aucun doute, et les seules évocations de son exceptionnelle carrière et de son palmarès ahurissant ne suffiraient pas à résumer son empreinte sur le monde du sport.
Le président de la Fédération internationale (IAAF), Sebastian Coe, a bien situé l’enjeu pour l’avenir de sa discipline, qui perdra bien plus qu’un athlète à l’issue des Mondiaux de Londres. « Je n’ai pas le souvenir de quelqu’un qui ait eu un tel impact depuis Muhammad Ali », a-t-il déclaré jeudi.
Il y a d’abord un parcours unique et une domination sans partage sur le sprint durant près de 10 ans : huit médailles d’or aux JO et 11 titres de champion du monde (un record), agrémentés de deux chronos prodigieux (9,58 s sur 100 m, 19,19 s sur 200 m).
CHARISME
Sur l’Olympe de l’athlétisme, le coureur de 30 ans n’est devancé que par deux autres géants : le Finlandais Paavo Nurmi, fondeur et crossman dans les années 1920, et l’Américain Carl Lewis, sprinteur et sauteur en longueur de génie à la fin du XXe siècle. Deux monuments que Bolt avait rejoints à Rio avant la perte de son titre sur le relais 4 x 100 m aux JO de 2008 à Pékin, la faute à un contrôle positif a posteriori de l’un de ses équipiers, Nesta Carter. Mais au-delà de cette incroyable moisson et de ses chronos supersoniques, c’est sa personnalité et son charisme qui ont forgé sa réputation, faisant de chacune de ses apparitions un événement. Bolt a crevé l’écran grâce à sa décontraction, son éternel sourire et son sens du spectacle, dans une discipline longtemps marquée par les postures intimidantes de coureurs roulant des mécaniques avant le départ. Une joie de vivre et une fraîcheur renforcées par un physique singulier chez les sprinteurs (1,96 m, 94 kg), à mille lieues des physiques trapus habituellement en vogue. Avec Bolt, le spectacle ne s’est jamais limité aux courses. Le Jamaïcain, avec sa bouille et sa joie de vivre, a cassé tous les codes en vigueur dans le milieu feutré de l’athlétisme, comme avec cette samba improvisée en fin de conférence de presse avec des danseuses brésiliennes avant le début des épreuves à Rio et son désormais célébrissime signe de l’Éclair. Le vide qu’il laissera dans le monde de l’athlétisme sera difficile à combler. Surtout pour un sport cerné par les affaires et dont l’image est au plus bas.